"J'ai tendu des cordes de clocher à clocher ; des guirlandes de fenêtre à fenêtre ; des chaînes d'or d'étoile à étoile, et je danse. " (Arthur Rimbaud)
Devant moi, un clochard aux pieds nus titubait dans la foule. C'était rue Crébillon, en descendant la pente. J'ai levé les yeux pour ne plus voir ce malheureux, déjà tombé à terre, et j'ai aperçu ses chaussures. Elles pendaient sur le fil comme guenilles noires oubliées sous la pluie, guirlandes de misère aux branches du crachin.
On en voit beaucoup, en ce moment, à Nantes, de ces chaussures pendues aux fils qui traversent les rues.
La nuit, je crois, errent au ciel chagrin d'ici d'étranges funambules.
Ils grimpent en rêve sur les murs et les toits, abandonnent là-haut leurs semelles terrestres, encore toutes crottées de la boue des jours ternes. Puis ils s'en vont, dans l'ombre où grandissent les songes, visiter dans l'ivresse le Passage des astres et les panoramas des vieilles lunes, aux angles miroitants des couloirs de la nuit.
Chaque matin de pluie les voit s'en revenir, vagabonds déchaussés maladroits qui glissent dans la boue. Tandis que là-haut, sous le ciel frissonnant déshabillé de ses étoiles, dans le vent froid et nu, leurs souliers pendus se balancent - noirs croquenots crochetés à l'hameçon des rois pêcheurs usés, vieilles baskets de sept lieues, chaussons de Nijnsky jetés au vent parmi les cendres.
Car nos corps sont d'os lourds, et nos vies sont de rouille, en cet âge de fer. Nous retombons toujours au sol, un peu plus lourds seulement d'avoir rêvé que nous volions.
Le Belem
J'ai été surprise, hier soir, alors que je rentrais, à la nuit tombante, par le quai de la Fosse, d'y rencontrer le Belem.
Je ne savais pas qu'il était revenu à Nantes.
Face au port délaissé transformé en musée, avec ses grues Titan figées et ses anneaux lumineux immobiles, il dressait haut ses trois beaux mâts tremblants, comme des troncs vivants dans la forêt du temps.
La Loire s'en allait de nouveau vers la mer, toute chargée d'appels et de voiles, l'île Mabon depuis longtemps noyée s'endormait comme avant parmi ses haies plantées d'oiseaux, et, sur les hauts cordages des navires descendant le flot, on avait retendu la toile grise des vieux jours disparus.
J'ai laissé l'ombre du Belem glisser vers moi qui me tenais sur le quai du tramway, dans le vacarme des automobiles - j'ai entendu, distinctement, le cri aigu de la vigie et le lent grincement du gouvernail dans le claquement des voiles et le tintement des mâts.
Il erre de port en port, ce Belem, comme un vaisseau-fantôme, tout autour de la terre, mais partout où il passe on l'attend, et, partout, c'est bien vivant qu'il entre, reprenant aussitôt dans les ports évanouis, bétonnés, transformés, la place qui n'a jamais cessé d'être la sienne.
D'où vient que le gréement des antiques vaisseaux soit encore si haut dressé dans nos vies de modernes qui n'allons plus au loin qu'en avion ?
D'où vient qu'en nous tant de vies disparues que nous n'avons jamais connues se pressent encore, que nous continuions à voir le monde avec les yeux des marins naufragés, des soldats morts, des chasseurs affamés, des paysans épuisés, des maçons oubliés d'une histoire révolue ?
D'où vient qu'être au monde, ce soit être dans tant de mondes qu'on ne peut vivre qu'errant, glissant d'un port à un autre, une vieille malle à la main, cherchant sa route sur des cartes jaunies semées d'îles englouties ?
La Fileuse
Nantes - angle de la rue de Feltre et du cours des Cinquante-otages.
Je l'ai découverte un jour de pluie, en levant la tête vers le ciel inflexible.
Elle se tenait toute vieille et usée, à l'angle mort du carrefour, silhouette sombre et indistincte, tête mince d'insecte sans regard, cape de feuilles mortes, et si grande pourtant, avec son fuseau de laine grise - plus haute que l'église Saint-Nicolas, qu'on vient de restaurer, plus haute que la vieille halle, avec sa grosse horloge.
Elle ornait sans doute autrefois une boutique où l'on vendait du drap, de la laine ou du fil. Elle décore aujourd'hui la façade d'une banque - pourquoi pas ?
On l'a déguisée, pour n'effrayer personne, en cette pauvre figure de réclame grossièrement raclée sur la pierre qui s'efface. Mais c'est elle à n'en pas douter, la Fileuse. Il fallait bien qu'elle soit quelque part, au travail.
Dire qu'elle tient son fuseau comme une torche, et que nous n'en sommes pas plus lucides.
Ecume
Cette brindille de l'automne plantée sur le rivage comme une croix rustique, combien de temps faudrait-il au courant pour la coucher sur le sable ? Combien de temps pour l'emporter au loin, radeau léger, insecte du flot boueux ?
Elle était si fragile, déjà dénudée par l'hiver, et de si peu de poids bientôt dans le grand naufrage.
Mais sur ce brin de vie infime, luttant contre le courant noir, s'accumulait et grandissait l'écume délicate - dentelle de l'eau douce, souffle ajouré des vagues. Et la mince brindille était dans son écrin neigeux comme un rameau d'ébène.
Souvent, ce n'est pas aux êtres qu'on croit forts que la beauté se donne,
ce n'est pas vers les grands chênes qu'on admire qu'elle s'avance
heureuse, généreuse.
Souvent, ceux qu'elle choisit,
sans bruit,
ceux qu'elle choisit vraiment,
à qui elle passe au cou le collier de pure écume,
sans rien en dire à la rumeur,
ce sont ceux simplement, si délaissés sur leur rivage,
qui savent se tenir au bord des vagues,
humbles et droits,
pour la regarder bien en face,
sans regret de la vie,
avant d'être emportés
plus loin
qu'eux-mêmes.
Façades
A chaque fenêtre veillait un pan de nuit. Et le vide se penchait à tous les étages. Décor de théâtre étayé par d'énormes poutres. Masque de pierres usées. Il ne restait rien d'autre des beaux immeubles anciens qui s'étaient dressés là, avec leurs couloirs tapissés de fleurettes, leurs chambres un peu vétustes, leurs cheminées de marbre, et leurs plafonds moulurés noircis par les années.
C'est ainsi qu'on procède aujourd'hui dans les centres historiques des villes. On nettoie de leurs os les vieilles bâtisses, on ne laisse que les yeux et la douce peau claire du visage. Puis, contre ce masque mince, on colle de vastes édifices modernes et somptueux : hôtels de grand luxe, succursales de banques, ascenseurs silencieux, parois de miroirs et d'inox, longs couloirs où les portes numérotées ne s'ouvrent qu'à l'appel de codes mystérieux, bureaux climatisés où se décident des destins.
De la rue, quand le nouvel ensemble est fini, on ne remarque rien : la vieille façade continue à faire illusion. Il y a même des promeneurs distraits pour jeter, en levant les yeux, un regard admiratif et ému sur tant d'ancienne perfection.
De bien des choses qui forment aujourd'hui notre univers, on pourrait dire cela : la façade est restée identique, mais ce n'est plus qu'un masque mince, derrière lequel un autre monde s'est construit. On marche dans la rue qu'on croit toujours la même, un peu distrait, sans s'apercevoir de rien.
On a assisté au chantier, on a vu s'affairer les démolisseurs et les rebâtisseurs.
Mais, puisque le vieux visage est encore là, intact, et même bien gratté, on n'y croit pas vraiment.
Rien n'a changé, tout a changé pourtant.
On va sans prendre garde, au risque qu'un jour la façade fragile et mal collée ne s'effondre sur nos illusions, laissant à nu la gueule noire du nouvel édifice, si familier, si inconnu pourtant, et si sombre sans son sourire amène de pierre blonde usée.
Secret
Secret
Gardien de l'ombre
Maître des nuits sans fond
Tu remontes du puits
Des mots grinçants comme des chaînes.
L’eau noire que tu nous donnes N’étanche pas la soif De nos mémoires errantes Et l’écho qui te cherche De paroi en paroi Jamais ne te rencontre. Caillou qui tombe Notre cri Pierre qui s’effrite Notre vie Sur la margelle grise T'épiant dans ta fuite. Et là-bas, Tout en bas Cette lumière qui tremble Sur la peau brune et luisante de boue Du vieux fauve qu'on voit Remuer dans ses rides Sans répit nous appelle Au vertige De savoir. Dans le silence des vies grillagées Sur ton reflet tu veilles Sphinx accroupi Aux portes closes De notre enfer Secret.
L’eau noire que tu nous donnes N’étanche pas la soif De nos mémoires errantes Et l’écho qui te cherche De paroi en paroi Jamais ne te rencontre. Caillou qui tombe Notre cri Pierre qui s’effrite Notre vie Sur la margelle grise T'épiant dans ta fuite. Et là-bas, Tout en bas Cette lumière qui tremble Sur la peau brune et luisante de boue Du vieux fauve qu'on voit Remuer dans ses rides Sans répit nous appelle Au vertige De savoir. Dans le silence des vies grillagées Sur ton reflet tu veilles Sphinx accroupi Aux portes closes De notre enfer Secret.
L'arbre et le grillage
On ne l'avait pas remarqué sans doute quand on avait posé le grillage. Il était si petit, à peine une touffe de feuilles dans l'herbe, peut-être même un simple gland que l'automne avait égaré sous la mousse. Et personne n'avait pris la peine de l'arracher. Ou bien il était déjà là, jeune pousse incertaine et fragile, mais le tronc mince était à un peu de distance de la clôture, et on n'avait pas eu le coeur de l'abattre.
Puis il avait grandi, il avait forci, n'ayant pas d'autre choix que de s'appuyer sur le fer qui lui mordait la peau mais soutenait son élan.
Il était devenu finalement un arbre accompli, le plus beau, le plus grand de la haie, le plus chargé d'oiseaux et de nids pépiants.
Il y avait dans son écorce tant de blessures, tant de plaies corsetées par la ligature de métal.
L'acier lui était entré dans la chair et il s'était fiché peu à peu tout au fond de son être comme un os aigu.
C'était un arbre étranglé, un arbre dans les fers, mais qui n'en élevait que plus haut son libre et léger feuillage,
semblable à bien des hommes :
de ce qui l'opprimait faisant le support de sa vie,
de ses morsures nourrissant son écorce,
de sa douleur faisant un tronc solide,
fermement s'appuyant sur ce qui le blessait.
Et nul n'aurait su dire,
depuis tant d'années qu'il avait remâché ce fer,
si le grillage était son mal
d'enfance et de toujours,
ou s'il était, de tous ses biens, le plus précieux.
Aki
En ces premiers jours gris qui annoncent l'hiver, tandis que commencent les vendanges des coteaux de la Loire, je prépare mon voyage à venir au Japon. Et voilà qu'aujourd'hui j'apprends qu'en japonais "automne" se dit "aki" - ce qui s'écrit 秋, kanji formé en associant au premier signe, qui désigne les récoltes, celui qui désigne le feu. Je caresse du doigt pour l'apprendre le dessin très pur de l'idéogramme... il me semble en effet reconnaître ce grand incendie des fruits mûrs, et la chaleur féconde des rizières ressemées. Même je vois très bien, dans l'élan dentelé des traits qui s'entrecroisent, ce haut flamboiement des roues d'or et de sang que font les arbres au bord des routes, dans leur dernière parade.
Ce nom brûlant est aussi un prénom féminin, du reste très commun, qui, lui, s'écrit fréquemment あき, a-ki.
Car il est tout à fait possible d'écrire "automne" ainsi, à la manière maladroite des étrangers (qui restera toujours la mienne), des jeunes enfants et des gens peu instruits, en associant simplement deux signes du syllabaire hiragana : あき, a-ki.
Or, lisant à haute voix ces deux syllabes : "a-ki", on pourrait désigner, tant il y a d'homonymes en japonais, non seulement l'automne, mais aussi le vide, la vacance et l'attente, l'oisiveté sereine du temps libre ; ou bien tout au contraire la lassitude, l'épuisement, la fatigue d'une longue peine. Notions que deux kanjis différents dessineront à leur tour.
Et... et je crois préférable d'interrompre ici mes explications sans doute confuses d'élève appliquée et peu douée...
... mais c'est une très belle chose, vraiment, dans cette complexité si déroutante de l'écriture japonaise, qu'on puisse lire à la fois dans le livre d'images des superbes kanjis - si denses et si chargés de sens et d'élégance qu'ils sont chacun comme un vers de haïku -, et dans l'humble syllabaire, si riche, lui, d'homonymies miroitantes, aptes à dire aussi bien la saison des fruits que la jeune fille en fleurs, la mélancolie vague de ceux qui atteignent, après la peine des jours enfuis, l'automne de la vie, ou la patience sereine du passeur qui nous fera signe, tout à l'heure, de monter dans sa barque pour traverser le fleuve.
Ainsi, glissant d'une écriture à l'autre, "aki", l'automne, est tour à tour la fin de l'été, et le commencement de l'hiver, qui lui-même est l'attente, un peu triste et lasse, du printemps dont la ferveur fera naître l'été brûlant, où flambera de nouveau l'automne.
Cette façon de penser me plaît, qui désigne l'enfant nouveau-né du nom de la saison des morts, qui fait de ce qui doit finir l'attente d'un lendemain, de la feuille oisive et fanée le nid des récoltes nouvelles, de la grappe mûrie l'incendie des étés à venir, de notre lassitude le songe mélancolique d'où renaîtra la vie.
Il y a dans ce mot, "aki", comme dans bien d'autres mots japonais, le cercle fascinant de la brûlure des jours, de la douleur de disparaître et de la paix trouvée dans la douceur d'attendre. On goûte, en l'épelant, ce vin subtil de poésie et de méditation qui manquera toujours à notre "automne".
Pianos
J'étais arrêtée au feu qui fait l'angle de la rue de la Mainguais, juste sous le mirador de cette grande prison neuve qu'on a bâtie aux marges de la ville, quand, levant un instant les yeux, j'ai vu passer, très haut, bien plus haut que le mirador, tout un vol d'oiseaux merveilleux. C'était une troupe de nuages poussés par le vent, qui glissaient sur les grandes lignes blanches et parallèles que des avions avaient dessinées sur l'air bleu. On aurait cru une portée de ciel, promenant dans les airs une mélodie légère et silencieuse, plaçant ses mesures mystérieuses entre les filets de vapeur condensée.
Mais sur terre le feu est passé au vert, le flot des voitures m'a brutalement poussée, et je n'ai pu m'arrêter que bien plus loin, mal garée sur un arrêt d'autobus.
Il n'y avait évidemment plus rien à photographier. Dans le ciel le vent avait effacé les lignes de la portée, et les nuages effilochés, errant seuls et sans direction, tombaient en se froissant dans le beau néant bleu, comme des bouts de chansons abandonnés dans la corbeille par le Compositeur distrait. J'allais repartir, quand, devant moi, j'ai vu, soudain, le mot PIANOS. J'avais pris la route que m'indiquaient les nuages ; ils m'avaient entraînée dans un coin inconnu et particulièrement rébarbatif de cette banlieue industrielle où j'évite toujours, d'habitude, d'aller me perdre. Mais c'était vrai, on vendait des pianos tout près, dans un hangar gris, près d'un affreux entrepôt de meubles, sous les pylônes hérissés de câbles, au bord des containers rouillés. Des pianos... ici... ! Et des pianos de toutes les couleurs, des pianos blancs, des pianos rouges... Je l'aurais toujours ignoré si je n'avais suivi, sans hésiter, depuis le mirador, la mélodie du ciel... C'est peu de chose, ce parcours de banlieue que je vous raconte là, une anecdote infime... Il n'y a rien de surprenant, je le sais, à ce que les marchands de musique s'installent à la périphérie des villes, quand les loyers sont chers - et puis, bien sûr, la photo est manquée... Mais je voulais vous le dire, tout de même : ces nuages chantonnant par-dessus les prisons, ces routes vaporeuses tracées par de lourds avions, ces pianos colorés dans des entrepôts tristes, et ce chemin surtout, sous les hautes portées de brume - c'était le frêle chant du monde, l'appel fragile de la beauté, s'en venant jouer pour nous, quand nous n'y pensions plus, son petit air tranquille.
Il n'y avait évidemment plus rien à photographier. Dans le ciel le vent avait effacé les lignes de la portée, et les nuages effilochés, errant seuls et sans direction, tombaient en se froissant dans le beau néant bleu, comme des bouts de chansons abandonnés dans la corbeille par le Compositeur distrait. J'allais repartir, quand, devant moi, j'ai vu, soudain, le mot PIANOS. J'avais pris la route que m'indiquaient les nuages ; ils m'avaient entraînée dans un coin inconnu et particulièrement rébarbatif de cette banlieue industrielle où j'évite toujours, d'habitude, d'aller me perdre. Mais c'était vrai, on vendait des pianos tout près, dans un hangar gris, près d'un affreux entrepôt de meubles, sous les pylônes hérissés de câbles, au bord des containers rouillés. Des pianos... ici... ! Et des pianos de toutes les couleurs, des pianos blancs, des pianos rouges... Je l'aurais toujours ignoré si je n'avais suivi, sans hésiter, depuis le mirador, la mélodie du ciel... C'est peu de chose, ce parcours de banlieue que je vous raconte là, une anecdote infime... Il n'y a rien de surprenant, je le sais, à ce que les marchands de musique s'installent à la périphérie des villes, quand les loyers sont chers - et puis, bien sûr, la photo est manquée... Mais je voulais vous le dire, tout de même : ces nuages chantonnant par-dessus les prisons, ces routes vaporeuses tracées par de lourds avions, ces pianos colorés dans des entrepôts tristes, et ce chemin surtout, sous les hautes portées de brume - c'était le frêle chant du monde, l'appel fragile de la beauté, s'en venant jouer pour nous, quand nous n'y pensions plus, son petit air tranquille.
Soir d'automne en banlieue
"Je n'ai pas oublié, voisine de la ville
Notre blanche maison, petite mais tranquille ;
Sa Pomone de plâtre, et sa vieille Vénus
Dans un bosquet chétif cachant leurs membres nus,
Et le soleil, le soir, ruisselant et superbe..." (Charles Baudelaire, Tableaux parisiens)
Car la terne banlieue, voisine de la ville, a aussi ses soirs doux, et ses bancs solitaires, ses réverbères ardents, et ses automnes en feu, près des pavillons de parpaing et des terrains de sport.
Et la beauté, cette flâneuse de la vie, ne s'en tient pas aux lieux qu'on lui désigne, mais sait s'asseoir partout sans se faire remarquer. Et nous attendre. Et nous faire signe aussi, à nous qui faisons route à l'ombre, sur les chemins étroits de notre quotidien.