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Intuition

Publié le par Carole

Intuition---septembre-2014.jpg
 
C'est un mot vide et plein comme un grand parapet.
Un mot vide de mots, tout baigné de promesses.
C'est un pont qui s'en va vers là-bas comme l'eau.
Un reflet qui murmure sous l'esprit qui ricoche.
Un sillon à semer qu'a tracé chaque vague.
  
Elle pourrait obstinée nous conduire à l'erreur.
Jamais elle n'a montré toute la vérité.
Mais elle est sur le flot la lumière tenace
qui nous donne la force de savoir, de créer,
d'être au bord du présent comme sur un rivage.
 
Intuition,
qui a posé là-haut tout au-dessus du fleuve,
comme un miroir tranquille où recueillir la pluie,
le soleil et la nuit, et chaque mélodie,
ce nom qui nous regarde avec les yeux de l'âme ?
 
 
 

 

Publié dans Fables

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Défense de

Publié le par Carole

defense-d-afficher.jpg
 
Partout où l'on écrit
Défense de
Défense d'afficher
Défense de passer
Défense de danser
Défense de penser
Défense de.
Partout où s'est rouillé dans le béton armé,
le clou rongé d'ennui de la réalité,
comme ici je voudrais qu'un artiste s'en vienne,
tirant à petits traits son fil de funambule,
recoudre sur les murs les chemins étoilés
qui s'en vont 
qui s'en vont.
 
 
Rue de l'île Mabon, 26 novembre 2014

Publié dans Fables

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Béances

Publié le par Carole

fresque-version-2-copie-1.jpg
Nantes - La Fabrique, 26 novembre 2014
 
 
De loin, c'était une si vaste fresque. Si compliquée. Un grand pan d'univers, un monde entier de villes en délire et de créatures incertaines, chimères prisonnières, hideuses et naïves.
Le rêve d'un Jérôme Bosch d'aujourd'hui, grandi dans les cartoons et les jeux vidéo, parqué dans les volières d'une ville en grisaille.
 
En m'approchant j'ai remarqué les deux trous profonds dans le mur.
Une commande, sans doute, cette fresque.
 
Mur disgracié
déshabillé
peau de béton
tuyaux profonds
comme canons
à recouvrir
à recrépir
de fantaisie
de couleurs vives.
 
Mais l'artiste n'avait pas voulu tricher. Il avait dédaigné de masquer les trous et d'embrouiller en trompe-l'oeil nos regards complaisants.
Tant d'autres, à sa place, n'auraient pas résisté.
 
 
Beaucoup plus que la fresque, c'est le peintre que j'ai admiré. Le cran qu'il avait eu de travailler si longtemps à son mur, d'en faire un univers complet - d'en faire son univers grouillant et saturé. Et pendant tout ce temps, ces béances, de les savoir là-dedans, et de les y laisser toutes nues toutes brutes et brutales - comme si le vide et le noir avaient été jusqu'au bout nécessaires à la plénitude de son oeuvre.
 
Parce que, voyez-vous, ce n'est pas seulement une histoire de mur et de béton troué.
Non. C'est toujours comme cela. Il faut, pour qu'une oeuvre, quelle qu'elle soit, prenne son vol, qu'il y ait quelque part une béance, un trou noir, qui à la fois l'attire et la repousse, et qui l'oblige à concentrer ses forces - comme une étoile qui tenterait de fuir - comme un oiseau en cage qui ouvrirait enfin la porte de sa vie.
 
trou fresque
 

 

Publié dans Fables

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L'enseigne Chronos

Publié le par Carole

     Il y a plus d'un quart d'heure que monsieur Lopez attend sur le trottoir.
    Les travaux ont commencé la veille. Depuis la veille, il guette. Alors quand, tout à l'heure, depuis son petit balcon, il a vu arriver la machine, il a dévalé l'escalier. Mais, en bas, il n'a pas trouvé le gars [...]
 
Suite du récit à lire sur mon blog de récits et nouvelles cheminderonde;wordpress.com
    

Publié dans Récits et nouvelles

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Dans la nuit

Publié le par Carole

le-veilleur---version-tel-efface.jpg
 
Dans la nuit, c'est comme ça. 
Il y a ceux qui veillent. Il y a ceux qui guettent.
Ceux qui vous donnent la lumière. Ceux qui la font payer.
 
Vous qui marchez sans rien y voir, au plus sombre au plus noir,
Sachez-le, c'est comme ça,
Dans la nuit. Les veilleurs. Et puis tant d'araignées.
 

Publié dans Fables

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Jadis

Publié le par Carole

Jadis.jpg
 
Le chemin était bordé de ces énormes pierres qu'on traîne maintenant dans les terrains vagues de nos villes, pour empêcher l'accès. Bornes et remparts à la fois.
 
"Jadis", disait la pierre la plus grosse au Sisyphe de passage qui la heurtait du pied.
"Jadis".
C'est toujours curieux de rencontrer une pierre qui parle. Celle-ci philosophait dans les herbes d'automne.
"Jadis", sentier qui nous conduit où nous devons aller.
"Jadis", rocher qui nous entrave et bloque les issues.
"Jadis, disait la pierre à son Sisyphe, Jadis, on a tracé pour toi les chemins de mémoire, Jadis, on a planté pour toi les bornes de pensée. Jadis a allégé pour toi le fardeau de la vie. Charge à toi maintenant de rouler bien plus loin le grand rocher Demain..."
 

Publié dans Fables

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Un (petit) miracle

Publié le par Carole

eau de Lourdes-copie-1
 
Je passais Ile de Nantes. Du côté du Hangar à Bananes.
Soudain... J'ai cru avoir mal vu d'abord... mais non, dans la vitrine en rénovation, c'était bien un bidon d'eau de Lourdes. Une sorte de jerrican comme on en utilise parfois pour l'essence. Mais on lisait très bien : Lourdes.
L'eau avait-elle servi à faire le café, ou devait-elle aider à nettoyer l'étagère poussiéreuse ? Devait-elle attirer la faveur du ciel sur le bar à venir – car ce serait sans doute encore un bar qui allait s'ouvrir là ? Ou bien n'était-ce qu'une facétie ? Comment savoir ?
Un rayon de soleil éclairait la sainte Vierge et prêtait à la scène un petit air de Cène.
C'était une nature vive, naïve et drôle, à la fenêtre à malices de ce qui ne serait bientôt plus qu'un bar de nuit du Hangar à Bananes...
Je l'ai pris comme il m'était donné, cet infime miracle du quotidien.
Avec amusement et avec gratitude.
Car aux petits miracles du quotidien nous devons la joie, la légèreté et la fantaisie, qui sont l'eau sainte de la vie.
 

Publié dans Nantes

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Le puits et le ballon

Publié le par Carole

     Le puits et le ballon... curieux titre, n'est-ce pas ?... Non, ça ne vous dit rien, évidemment... Cela ne veut rien dire.
    Vous pensez à Edgar Poe ?  Oh, non ! Le puits et le ballon, ce n'est pas grand-chose, en réalité.
    C’est simplement le premier récit que j’ai tenté d'écrire. Et qui a bien failli être le dernier.
    J’étais encore en [...]
 
Suite du récit sur mon blog de récits et nouvelles cheminderonde.wordpress.com

Publié dans Récits et nouvelles

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Vos avenirs

Publié le par Carole

leur-avenir-2.jpg
 Takaki Takino - "Vos avenirs" (きみたちの未来- 15 novembre 2014 - Nantes, Maison de l'Erdre.
 
 
La photo s'intitulait "Vos avenirs". Justement ils passaient, main dans la main, jeunes et pensifs. C'était dans la Maison de l'Erdre, où l'on expose en ce moment les photographies de Takaki Takino, artiste exceptionnel. 
Ce qui surprend toujours, dans les oeuvres des grands photographes, c'est leur incroyable capacité à s'accorder avec ceux qui les rencontrent. A se placer tranquillement au plus près de chacun.
On passe, on regarde... non, on est regardé par ce regard que l'artiste a posé dans son oeuvre.
On ne s'en rend pas toujours compte, mais déjà, on est happé, on est ailleurs, dans l'image – exactement là où l'on devait être. 
 
 takaki-Kitano.jpg
 

Publié dans Japonisme

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Le visage du trottoir

Publié le par Carole

visage-trottoir-version-2.jpg
 
C'est le soir. C'est en ville. Un artiste anonyme a donné au trottoir un visage de craie. 
Façades sans regards. Silhouettes qui s'écartent. Dans la nuit noire et blanche glissent nos pas pleins d'ombres. 
"Help me... " murmure le trottoir. Où donc est-il passé, celui qui appelait ? Où s'est-il effacé, ne laissant sur la pierre qu'un visage de craie ? 
C'est le soir, il est tard. Dans les rues on se hâte. Mais personne ne marche sur le visage du trottoir. On croirait qu'ils ont peur, les passants sans visage, de fouler ce visage. Un visage anonyme, un si vaste visage. Un visage si large que les nôtres y tiendraient. Le visage d'un soir peinturluré d'espoir - et tombé dans le noir.
 
Le lendemain, au matin, il avait plu si fort
sur la craie sur la pierre
qu'il ne restait
plus rien.
 

Publié dans Nantes

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