L'arbre et le grillage

Publié le par Carole

arbre-grillage-copie-1.jpg
 
On ne l'avait pas remarqué sans doute quand on avait posé le grillage. Il était si petit, à peine une touffe de feuilles dans l'herbe, peut-être même un simple gland que l'automne avait égaré sous la mousse. Et personne n'avait pris la peine de l'arracher. Ou bien il était déjà là, jeune pousse incertaine et fragile, mais le tronc mince était à un peu de distance de la clôture, et on n'avait pas eu le coeur de l'abattre.
Puis il avait grandi, il avait forci, n'ayant pas d'autre choix que de s'appuyer sur le fer qui lui mordait la peau mais soutenait son élan.
Il était devenu finalement un arbre accompli, le plus beau, le plus grand de la haie, le plus chargé d'oiseaux et de nids pépiants.
 
Il y avait dans son écorce tant de blessures, tant de plaies corsetées par la ligature de métal.
L'acier lui était entré dans la chair et il s'était fiché peu à peu tout au fond de son être comme un os aigu.
C'était un arbre étranglé, un arbre dans les fers, mais qui n'en élevait que plus haut son libre et léger feuillage,
 
semblable à bien des hommes :
de ce qui l'opprimait faisant le support de sa vie,
de ses morsures nourrissant son écorce,
de sa douleur faisant un tronc solide,
fermement s'appuyant sur ce qui le blessait.
 
Et nul n'aurait su dire,
depuis tant d'années qu'il avait remâché ce fer,
si le grillage était son mal
d'enfance et de toujours,
ou s'il était, de tous ses biens, le plus précieux.

Publié dans Fables

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P
ici Pierrot,<br /> ce fut un honneur pour moi<br /> de rendre visite à un si noble blogue<br /> <br /> longue vie<br /> et mesci pour votre sensibilité<br /> aux arbres<br /> <br /> NOUS FUMES NOMADES CASSANDRE<br /> <br /> COUPLET 1<br /> <br /> nous fumes nomades Cassandre<br /> nous fumes nomades Cassandre<br /> <br /> hier j’ai dormi<br /> dans la forêt du labrador<br /> j’ai fais un feu<br /> mais j’avais froid<br /> sans toi dehors<br /> <br /> nous fumes nomades Cassandre<br /> Nous fumes nomades Cassandre<br /> <br /> hier on m’avait<br /> donne deux sandwichs au poulet<br /> j’aurais aimé les partager<br /> tu me manquais<br /> <br /> REFRAIN<br /> <br /> tes 19 ans Cassandre<br /> <br /> c’etait la vie<br /> avant l’barrage de Manic 5<br /> <br /> c’etait l’mont Wright Cassandre<br /> avant l’enfer<br /> d’la mine de fer<br /> en plein hiver<br /> <br /> c’était surtout<br /> la jeune femelle caribou<br /> et le vieux mâle encore debout<br /> <br /> c’etait surtout<br /> la jeune femelle caribou<br /> et le vieux mâle<br /> vagabond fou<br /> <br /> COUPLET 2<br /> <br /> vieux mâle au doux regard<br /> celui d’monsieur Bernard<br /> <br /> qui s’est battu<br /> pour sauver son chalet du feu<br /> avec son fils<br /> 4 nuits sans fermer les yeux<br /> <br /> c’est fascinant à voir<br /> un bout d’forêt toute noire<br /> <br /> y a des souvenirs de jeune femme<br /> qui s’enflamment au fond de soi<br /> se consumant tout comme<br /> un ancien feu de joie<br /> <br /> COUPLET 3<br /> <br /> debout je marche la vie<br /> debout je prie la vie<br /> <br /> pour que la riviêre de tes rêves<br /> soit aussi belle<br /> que la petite Manicouagan<br /> <br /> devant laquelle j’écris<br /> la tendresse de mes cris<br /> <br /> parce qu’une nuit<br /> t’as pris l’bateau<br /> qui t’a conduite<br /> de Bécomo à Rimouski<br /> <br /> Pierrot<br /> vagabond céleste<br /> <br /> WWW.DEMERS.QC.CA<br /> CHANSONS DE PIERROT<br /> PAROLES ET MUSIQUE<br /> NOUS FUMES NOMADES CASSANDRE
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P
Ici Pierrot, vagabond-poète du Québec<br /> <br /> Bravo pour ce magnifique poème<br /> au sujet d'une blessure d'un arbre:)))<br /> <br /> Dans le cadre de mon vagabondage poétique<br /> blogues-musée pertinents mais aléatoires<br /> pour mon oeuvre littéraire<br /> pertinente mais aléatoire,<br /> <br /> permettez-moi<br /> de vous offrir<br /> une de mes chansons<br /> <br /> L'ECORCE D'UN ARBRE<br /> <br /> couplet 1<br /> <br /> Quand t'as l'corps comme l'écorce d'un arbre<br /> les mains propres comme des feuilles d'Automne<br /> les yeux rougis par des rides en gouttes de pluie<br /> c'est que l'bon dieu t'as accordé, un sursis<br /> <br /> couplet 2<br /> <br /> un sursis pour dire à ma femme<br /> je rêve d'acheter deux chaises berçantes<br /> des bonnes couvertes, une chandelle<br /> du thé de menthe<br /> pour rapiécer les bouts d'passé<br /> qui me manquent<br /> <br /> couplet 3<br /> <br /> à soir j'ferme la télévision<br /> j'ai la coupe stanley à maison<br /> 87 ans cette année j'ai l'goût d'parler<br /> j'veux d'profiter d'la rémission<br /> qui m'est donnée<br /> <br /> couplet 4<br /> <br /> c'est sur mon p'tit lit d'hôpital<br /> que j'ai hurlé quand j'ai eu mal<br /> que j'ai crié, Doré Doré sors-moé de d'là<br /> j'ai eu peur de mourir sans toé<br /> ma femme à moé<br /> <br /> couplet 5<br /> <br /> toute ma vie j'ai dit à mes chums<br /> qu'ma femme avait marié un beau bonhomme<br /> à soir ton beau bonhomme<br /> veut s'confesser<br /> y veut pu qu'tu t'sentes mal aimée<br /> mal aimée<br /> <br /> couplet 6<br /> <br /> quand t'as l'corps comme l'écorce d'un arbre<br /> les mains propres comme des feuilles d'automne<br /> les yeux rougis, par des rides<br /> en gouttes de pluie<br /> <br /> c'est que l'bon Dieu<br /> m'a accordé<br /> un sursis<br /> <br /> pour dire<br /> à ma femme<br /> merci:)))<br /> <br /> www.enracontantpierrot.blogspot.com<br /> www.reveursequitables.com<br /> <br /> www.demers.qc.ca<br /> chansons de pierrot<br /> paroles et musique<br /> <br /> sur google,<br /> Simon Gauthier, conteur, video vagabond celeste<br /> <br /> merci<br /> Pierrot, vagabond poète
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C
<br /> <br /> Merci, Pierrot, pour cette belle chanson qui a la bonne odeur des arbres et des hommes de la terre. J'aime tant vos visites vagabondes...<br /> <br /> <br /> <br />
N
Oui c'est sur, je parlais surtout de la photographie qui est tout de même un peu douloureuse à voir, mais vous en avez fait quelque chose de magnifique !
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N
Bonjour Carole, je découvre votre blog avec cet article qui me bouleverse... C'est une superbe réflexion à partir d'une vision un peu triste, vous avez vraiment une très jolie facon de penser,<br /> merci de l'avoir partagé ici d'une si belle manière !<br /> Bon dimanche à vous
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C
<br /> <br /> Merci, Naïs. Je ne sais pas si l'article est triste, il parle aussi d'espoir, de "guérison".<br /> <br /> <br /> <br />
C
Bonsoir Carole,<br /> <br /> Ta réponse m'a profondément touchée...<br /> Le pouvoir des mots est si intense. J'y trouve un grand réconfort même si, parfois/souvent, je dois redoubler d'efforts pour me concentrer et organiser ma pensée en raison des douleurs et des<br /> prises d'opiacés.<br /> Mais quand je me suis retrouvée confrontée à un choix: vivre ou sombrer, accepter que la douleur intense ferait partie de ma vie ou... que faire?, chaque petite parcelle de beauté, de bonheur, de<br /> rêve est devenue un trésor.<br /> Cela m'a amenée à une forme d'équilibre, très fragile, mais bien réel.<br /> Je prends beaucoup de plaisir à lire tes écrits. Ils font partie de ces trésors et je t'en remercie.<br /> Bonne nuit, bises<br /> <br /> Cendrine
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C
<br /> <br /> Il arrive que, de nos maux, nous tirions des forces... et même il arrive souvent qu'il n'y ait pas d'autre voie vers ces "forces" que nous découvrons alors en nous, mais le prix à payer est<br /> parfois lourd. Je pense que toi, tu as trouvé ton équilibre, oui, dans la réflexion, dans l'écriture et dans le partage. Et je ne crois pas que cela soit "fragile".<br /> <br /> <br /> <br />
E
Quelle souffrance dans cette photo, mais aussi , quelle volonté de vaincre et de vivre. Très joli texte.Belle soirée Carole
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C
<br /> <br /> Un arbre "double", souffrant et fort.<br /> <br /> <br /> <br />
L
Bonjour,<br /> Je découvre ce blog via celui de Pascale Madeleine. Quelle bonne surprise !<br /> Ce texte, particulièrement, me fait mal et m'enchante.<br /> Si on lui enlevait la ferraille, comment réagirait-il ? Mal sans doute, plus douloureux encore.<br /> C'est très beau.<br /> Amicalement,<br /> Louv'
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C
<br /> <br /> Je réponds un peu tard à ce commentaire, mais il m'a fait le plus grand plaisir : c'est toujours un enchantement pour moi, que, de blog en blog et de communauté en communauté, on puisse partager<br /> tant de choses ! Merci donc, et à bientôt.<br /> <br /> <br /> <br />
L
Triste de voir cela, c'est vrai, mais l'arbre aura raison du grillage, c'est sûr...
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C
<br /> <br /> Ils sont en symbiose désormais, je crois.<br /> <br /> <br /> <br />
A
Voilà là un état qui peut porter le nom de "résilience"<br /> Comme j'aime ta plume !
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C
<br /> <br /> C'est précisément cela - Merci, Armide, à bientôt.<br /> <br /> <br /> <br />
N
j'aime beaucoup, et comme toujours, cela montre que la nature pousse partout, en fait elle est plus forte que tout..<br /> Bonne semaine, bizzz
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C
<br /> <br /> Le désir de vivre est toujours le plus fort. Merci ! Bonne semaine à toi aussi.<br /> <br /> <br /> <br />
C
Nous grandissons tous avec nos blessures : un arbre à notre image.
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C
<br /> <br /> Oui, il m'a semblé très humain.<br /> <br /> <br /> <br />
B
Etrange, comme s'il voulait s'approprier le grillage...
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C
<br /> <br /> Il en a fait sa chair. <br /> <br /> <br /> <br />
D
oh que j'aime ç. Ton texte, superbe et la photo. On ne sait plus finalement si c'est blessure ou union. c'est beau.
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C
<br /> <br /> Merci beaucoup, Dominique. J'apprécie toujours ton jugement.<br /> <br /> <br /> Cet arbre était très beau ainsi, je le pense aussi.<br /> <br /> <br /> <br />
M
Ce n'est pas la première fois que je rencontre ce phénomène et ça me fascine toujours... est-ce le grillage qui s'incruste dans l'arbre ou bien l'arbre qui dévore le grillage ? j'opte pour la<br /> seconde hypothèse...
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C
<br /> <br /> Les deux, non ?<br /> <br /> <br /> <br />
J
Il a su transcender sa blessure, souffrance. Combien de personnes vivent vraiment à partir du moment où elles se savent atteintes d'une maladie mortelle ! Amitié. Joëlle
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C
<br /> <br /> C'est une question qu'on évite souvent de se poser... Je crois que je ne ferais pas partie des sages. Mon arbre, lui, n'était que blessé, mais bien vivant et élancé.<br /> <br /> <br /> <br />
P
Bonjour Carole,<br /> (je viens de chez Jonas)<br /> C'est exactement ce que je me dis lorsque je rencontre un arbre dont l'écorce coince un bout de grillage ou de corde ! A moins que ce ne soit le contraire ?
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C
<br /> <br /> Ils ne sauraient exister l'un sans l'autre, désormais.<br /> <br /> <br /> Merci Pascale.<br /> <br /> <br /> <br />
H
Je crois qu'il était devenu son frère, un peu.<br /> <br /> Hélène*
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C
<br /> <br /> Tout à fait, et le lierre, qui s'y connais, pousse indifféremment sur l'arbre, sur les poteaux et sur le grillage...<br /> <br /> <br /> <br />
C
Bonsoir Carole,<br /> <br /> Je suis, une nouvelle fois, émerveillée par ton écriture, par la force qui en émane et qui s'imprègne dans mon coeur de lectrice...<br /> Cette photo me fait mal et pourtant je la trouve si belle... L'arbre est un émissaire entre terre et ciel, il jaillit comme une flamme et ses meurtrissures sont sa force intime!<br /> Je ne cherche pas à ramener les choses à moi mais ce que tu as écrit me fait irrémédiablement penser à ma vie...<br /> Je vis avec des racines dentaires, des nerfs et des vaisseaux sanguins malformés, que mon corps rejette mais que l'on ne peut m'ôter sous peine de me tuer. J'ai littéralement le choix entre<br /> souffrir et mourir! Alors on m'a posé des tiges de métal dans les chairs de la mâchoire, (je résume beaucoup), une opération expérimentale non cautionnée par la Sécurité Sociale bien que le<br /> chirurgien soit un professeur émérite. Lui même ne savait pas vraiment sur quel terrain étrange il s'aventurait...<br /> Mes racines dentaires sont qualifiées d'arborescences orphelines complexes et le collège de professeurs qui les ont examinées n'avaient jamais vu cela... ils se demandent comment je peux être en<br /> vie, sachant que je porte un "non sens" en moi, je cite...<br /> <br /> Ce que j'ai perçu dès que j'ai senti ma "différence" c'est que je devrais vivre avec la souffrance et m'appuyer sur elle pour continuer à être. Alors quand je vois cet arbre...<br /> <br /> J'ai continuellement ces tiges de métal qui s'enfoncent dans mes muqueuses, des lésions, des inflammations, des hémorragies et la douleur ne cesse jamais. Mais je vis et je le supporte en puisant<br /> dans tout ce qui m'entoure. Je ne suis pas un arbre mais j'en visualise souvent la silhouette et j'en ressens la force intemporelle...<br /> <br /> Merci pour ce superbe texte qui m'a fait parler de moi, certes, mais on ne peut réfréner l'écriture et le ressenti...<br /> <br /> Je te souhaite une excellente semaine à venir, bisous<br /> <br /> Cendrine
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C
<br /> <br /> Cendrine, je ne sais que répondre à ton commentaire bouleversant. Je me rends compte que mes "fables" peuvent toucher de près ceux qui les lisent. Et j'en suis à la fois heureuse (puisque tout<br /> écrivain souhaite "parler" à ses lecteurs) et profondément troublée (car je redoute de réveiller des souffrances). <br /> <br /> <br /> Je voudrais juste ajouter ceci : que tu puisses à la fois tant souffrir et manifester tant d'empathie et de sensibilité envers les autres, et t'intéresser aussi passionnément à ton environnement<br /> parisien, cela force l'admiration !<br /> <br /> <br /> Avec toute mon amitié et tout mon respect, Carole<br /> <br /> <br />  <br /> <br /> <br /> <br />
G
Quel supplice au fil des jours enfin on peut toujours ce l'imaginer
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C
<br /> <br /> C'est significatif ce que tu écris : les arbres nous semblent toujours "humains". J'ai exploité cette idée dans le texte.<br /> <br /> <br /> <br />
J
Bonsoir Carole, j'aime beaucoup l'ouverture du dernier paragraphe. En extrapolant un peu, on pourrait l'associer au syndrome de Stockholm. Bon texte.<br /> Jonas
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C
<br /> <br /> A ce syndrome, et à bien d'autres. Tant de failles sous le sol qui soutient nos vies...<br /> <br /> <br /> <br />
M
Comment ne pas penser au saule de Verhaeren, en lisant ce texte si beau Carole.
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C
<br /> <br /> Voilà une référence à laquelle je n'avais pas songé, mais qui me plaît infiniment. <br /> <br /> <br /> <br />
N
Encore une belle réflexion. Comme pour les hommes qui se sont reconstruits sur leur douleur, vouloir le lui enlever serait plus blessant encore.
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C
<br /> <br /> C'est souvent ainsi. Les blessures nous font vivre - autant que les joies. Tout "cristallise".<br /> <br /> <br /> <br />
J
Bonjour Carole... Tom Pouce dans l'hiver et un géant vert des années plus tard... "enchaîné" chez les hommes ces liliputiens... merci tu racontes tjs superbement les choses de la vie...
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C
<br /> <br /> Merci, Jill. Nous ne sommes que des lilliputiens, face à la sagesse des arbres, c'est vrai.<br /> <br /> <br /> <br />
E
ça fait mal à voir - tu sais à quoi ça me fait penser cette image ? à ces vieilles personnes qui ont parfois leur alliance incrustée dans leur doigt au point qu'il faut la scier si on doit la<br /> retirer
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C
<br /> <br /> Le parallèle est juste, car cette alliance qui semble abîmer le doigt, c'est aussi le symbole d'une vie qui s'est construite.<br /> <br /> <br /> <br />