Chemin d'ailes
Sur le chemin, les ailes ouvertes, elle m'attendait.
Sur le chemin, les ailes ouvertes, elle m'attendait.
Suite du récit sur mon blog de récits et nouvelles cheminderonde.wordpress.com
Ah, mon idée ! L'Idée - si longtemps attendue, si tendrement nourrie, si longuement guettée, si patiemment hameçonnée...
La voilà qui s'approche, qui mordille si vive, qui frétille si fine.
Je me penche, je m'élance, je tends tous mes filets ! comme elle luit, comme elle brille !
La voilà qui se prend, sirène ligotée, tournant et scintillant dans toutes ses écailles... oh, je la tiens déjà, je la veux, la harponne et la croche... c'est fait, elle est à moi ! Ah, mon idée, l'Idée !
Mais quel reflet m'a distraite, m'amusant de son rien ?
N'est-ce pas plutôt ce froid, soudain, qui fait trembler ma gaule, cette ombre sur l'eau noire des arbres qui grimacent ?
J'hésite, je procrastine - et elle, oh, mon idée, l'Idée, déjà elle crache l'hameçon, se dégage en riant, se disperse en déesse dans tous les plis de l'eau...
Je croyais la tenir, j'étais si sûre de moi, j'étais si sûre d'elle, et voilà qu'elle m'échappe, qu'elle a fui, qu'elle a tout à fait disparu.
Ah, mon idée ! L'Idée - C'était au bond qu'il fallait la saisir ! L'enlacer ligotée. La jeter toute vive dans mon seau à projets. Ne jamais la lâcher, plus jamais, la garder bien serrée dans son eau de lumière.
Au bout de mon hésitation, belle indocile elle a pris son élan, pour s'en aller rêver plus loin, toujours plus loin, vers cet horizon vague où les pensées qui se défilent croient se recoudre au ciel.
Je l'ai laissé passer, l'instant qui s'en venait à moi,
je l'ai laissée me laisser, l'Idée qui était mienne et qui sera néant.
Ah, mon idée ! l'Idée ! Enfuie, perdue, paillette d'or fondue dans le flot des possibles, écume des étoiles qui miroitent là-bas... Et moi qui ne sais plus où la pleurer, moi qui n'ai jamais su où la chercher...
Ah, mon idée ! l'Idée ! cadavre absent sans visage et sans nom dont je mène le deuil sans savoir qui tu fus...
...je t'ai gravé
cette épitaphe :
A MON IDEE
in memoria
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