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Eventail

Publié le par Carole

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Grue Titan - anciens chantiers navals de Nantes - 30 octobre 2014 - 18 heures 07.
 
 
Il y a des lieux qu'on a vus si souvent qu'on ne les voit plus, des lieux qu'on ne songe même plus à regarder. Et puis, soudain, alors qu'on passait distrait comme à l'habitude, on lève un instant les yeux – juste un instant, sans y penser – et on s'arrête, émerveillé, fasciné, stupéfait. Car tout est là, tout, bien à sa place. Les couleurs et les ombres. Les verticales et les horizontales. Les obliques si nettes et la résille effilochée des arbres d'automne. Les bancs de nuages ondulant sur leurs vagues de couchant, et l'oiseau minuscule épinglé au grand ciel. Même ces mots, absurdes jusqu'alors, posés tout en bas du tableau dans leur coin d'ombre, comme une signature de maître – "Cale 2 créateurs".
Voilà que le paysage banal se déploie devant nous somptueux et parfait, comme un éventail ouvert dans la main du soir. Juste un instant. Et c'est si déchirant de le voir se refermer, indifférent à sa propre perfection, dans la nuit et l'écroulement des lignes, à l'instant même où on était enfin capable de le regarder.
 

Publié dans Nantes

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La voie

Publié le par Carole

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J'ai sous les yeux le catalogue de l'exposition "Hokusaï" qu'on peut voir en ce moment au Grand Palais.
Et ce qui me bouleverse, ce n'est pas seulement de constater l'incroyable richesse et la perfection surhumaine de cette oeuvre, c'est surtout de pouvoir, image après image et page après page, grâce à l'organisation chronologique qui a été si justement choisie, suivre tout doucement la "voie" empruntée par le maître.
Elle nous est presque étrangère, à nous impatients Occidentaux, cette notion de "voie", pourtant c'est l'une des clés qui pourraient nous ouvrir, si nous savions la tourner et la retourner, les portes innombrables, transparentes et opaques, solides et coulissantes, de l'ancienne pensée japonaise. Tout ce qui demande savoir ou savoir-faire s'apprend selon le "dô", la "voie", et il y a une "voie" pour les peintres et les calligraphes aussi bien que pour les guerriers et les femmes de la bonne société apprenant à nouer l'obi des kimonos ou à préparer le thé.
Comme tout chemin, la "voie" a d'abord été tracée par les pas de milliers de prédécesseurs. Et, comme tout chemin, elle va d'étape en étape. Ainsi, le peintre s'engageant dans la voie apprend lentement son métier, suivant son maître. Lorsqu'enfin il franchit la première étape, le premier "dan" qui lui permet de s'approcher du maître, il lui est loisible de changer de nom, car la voie est un chemin toujours double : comme un arbre mobile dont les racines accompagnent le feuillage, elle chemine à la fois dans les réalisations visibles de celui qui la suit et dans les profondeurs invisibles de son être.
Puis, parvenu un peu plus loin sur la "voie", le peintre atteint la seconde étape, celle qui fait de lui un maître à son tour. Il change encore de nom, et il reprend le chemin qui ne peut s'arrêter. Il lui faut atteindre l'étape suivante, et la suivante encore, pour avancer, d'étape en étape, juqu'au dernier "dan". Là seulement commence l'autre chemin, celui qui mène à l'inconnu. Et seul peut l'atteindre le maître qui a vécu assez vieux pour s'être plusieurs fois dépouillé de son nom, comme un mince serpent changeant de peau jusqu'à se faire dragon. C'est pourquoi Hokusaï, estimant qu'il n'avait commencé à comprendre son art qu'à l'âge de soixante-treize ans, a exprimé le souhait en apparence insensé de vivre au moins cent-dix ans afin que "point ou ligne, tout soit vivant" dans ce qu'il tracerait. Et c'est en effet dans ses années d'extrême vieillesse qu'on voit son art se libérer, tenter toutes les expériences, tous les renouvellements, toutes les folies de la vie bouillonnante.
Ainsi, alors qu'en Occident, à la même époque, de jeunes artistes se chargeaient comme des géants de frayer seuls et d'un coup des avenues nouvelles, au Japon le vieux maître avançait sur son étroite voie, à petits pas de nain, attendant le grand âge pour s'élancer en titan là où s'effacent toutes les routes.
 
Dans la dernière oeuvre qu'on connaisse de lui, réalisée alors qu'il avait probablement quatre-vingt-neuf ans et se faisait appeler Gakyō Rôjin Manji, "le vieux fou de peinture", un dragon s'envole dans le ciel sur le dernier tronçon insaisissable du chemin, ce nuage noir sinuant qui conduira peut-être au néant, peut-être à l'infini. Peu importe. L'essentiel est que son corps vertigineux se confonde exactement avec le tracé de l'encre. Ou inversement. A moins que ce ne soit encore le contraire.
 
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Publié dans Japonisme

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Le fil de l'âme

Publié le par Carole

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Broderie de Mitsuko Uesugi exposée au festival "Samouraï" - Nantes, château des ducs, 26 octobre 2014
 
 
Derrière la vitre, deux grues de soie dans le ciel du Japon. Et sur la vitre le reflet des pavés de la vieille demeure des ducs de Bretagne.
Tous les fils colorés du ciel de là-bas se retissant aux flaques de granit du sol grisé d'ici.
 
C'était hier "o-matsuri" au château de la reine Anne où l'on avait organisé un festival japonais en soutien aux victimes de Fukushima. Et l'on pouvait admirer, parmi les chants, les danses, les représentations de kabuki et les combats de samouraïs, d'incroyables broderies, réalisées par une Japonaise de 107 ans, Mitsuko Uesugi. 
Il paraît qu'elle a commencé à broder à 94 ans, et que depuis elle n'arrête plus de tendre ce fil qui s'étire comme sa vie, tressant des oiseaux, des déesses et des nains, tout un peuple de soie naissant somptueux et vivant de ses vieux doigts mourants.
 
Ainsi, parfois, dans le corps épuisé d'un vieillard qui s'efface, grandit l'âme neuve et légère d'un artiste nouveau-né. 
 
 
La brodeuse de là-bas avait lancé jusqu'ici, sur le fuseau tourbillonnant du monde, le fil fragile de son âme d'artiste, et c'était beau de le voir s'enrouler jusqu'à nous comme un toton d'éternité.
Il suffirait, se disait-on, que le fil vole léger de vie en vie, qu'il ne rompe jamais, qu'il s'en aille sans fin tournant
de main en main
et d'âme en âme
pour rhabiller le monde
le triste monde où l'on meurt où l'on hait
de sa parure secrète de sa parure première
de sa parure de fête.
 
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 Broderie de Mitsuko Uesugi exposée au festival "Samouraï"
Nantes, château des ducs, 26 octobre 2014
 
 
 

 

Publié dans Nantes

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Portes de craie

Publié le par Carole

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L'échafaudage était habillé d'une vaste tente, sur laquelle on avait redessiné le bâtiment comme un décor de théâtre. 
A peine si l'on distinguait encore la poignée luisante, et la forte serrure, de la porte de bois qui menait, derrière la fragile muraille de toile, aux coulisses du chantier, peuplées de poutres, de passerelles métalliques et de rudes ouvriers à l'ouvrage. 
On recouvre ainsi désormais de grands voiles baroques les bâtiments en travaux des beaux quartiers, pour cacher l'effort si méprisé des travailleurs de l'ombre. Mais la porte... la porte qui toujours mènera de l'apparence à son envers, il faut bien qu'elle s'ouvre quand même quelque part, même à peine, n'est-ce pas ?
 
Cette porte de bois plantée dans son dessin m'a rappelé un conte inverse - exactement inverse -, lu autrefois dans un vieux livre que j'avais emprunté à la bibliothèque de mon école-,  l'un des premiers que j'aie lu, à moins que je ne l'aie rêvé.
Il y était question d'un bonhomme qu'on avait dessiné à la craie. Il prenait vie dans le dessin qui l'avait jeté sur le papier, puis il s'emparait à son tour de la craie oubliée par le dessinateur. Muni de cette craie, il s'avançait hardiment dans le monde qu'on appelle réel. Et, chaque fois qu'il rencontrait un mur, avec sa craie, tout simplement, il ouvrait une porte dans ce mur. Il s'en allait ainsi, de mur en mur, ouvrant toujours des portes que son avancée refermait, traversant sans fin les rudes parois de ce monde et sans fin se heurtant de nouveau à elles.
Il m'est aujourd'hui impossible de me souvenir de la façon dont finissait l'histoire. Peut-être à la fin le bonhomme de craie se fracassait-il sur un dernier mur, ultime rempart du réel venant à bout du rêve ? Je ne sais pas. Je ne me souviens que de ces portes de craie s'ouvrant sur les murs sombres, et qui se refermaient derrière lui, l'obligeant à ouvrir encore, dans les murailles qui s'épaississaient, des portes toujours nouvelles et toujours plus fragiles.
Le livre me fascinait, je le lisais et le relisais, essayant d'en approfondir le mystère, dessinant moi-même à la craie, sur tous les murs qui se heurtaient à mon élan, des portes étroites et bancales qui refusaient de s'ouvrir. Et je réessayais toujours, incapable de me résigner, brisant ma craie sans force sur ma petite ardoise d'écolière maladroite.
J'avais dû le deviner, que le bonhomme à la craie était une métaphore de l'artiste, ce travailleur maudit, condamné à dessiner et redessiner sans fin les portes d'illusion qui pourraient mener de l'autre côté des murailles, tandis que derrière lui les remparts se referment, inexorablement indifférents à son effort.
 
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Publié dans Enfance

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Mademoiselle Landois, mademoiselle Benoit

Publié le par Carole

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   Chez un bouquiniste de la ville, j'ai trouvé un petit fascicule probablement très rare et tout à fait précieux par les faits qu'il relate.
   Il est signé F. Soil - l'auteur doit être ce Fernand Soil qui a donné son nom à la petite place des cafés et des boutiques en trompe-l'oeil, derrière la rue du Bois-Tortu-, c'est un dossier simplement dactylographié de 27 pages, daté de 1942. Rédigé avec la sobriété nette des Chroniques et des Journaux de bourgeois des temps passé, il est intitulé "Meurtre du lieutenant-colonel Hotz, Feldkommandant de Nantes, le 20 octobre 1941, Notes de M. le Secrétaire général de la ville".
   On peut y lire ceci, aux pages 9 et 10 relatant les événements du 22 octobre : après l'exécution des premiers otages, et dans l'attente d'une nouvelle exécution, "Mlle LANDOIS demeurant à Nantes, 2, place Sainte-Croix, est venue s'offrir aux autorités allemandes pour être exécutée à la place d'un père de famille." Et, page 12, au jeudi 23 octobre : "Mlle BENOIT, Professeur au Conservatoire, est allée à la Kreiskommandantur se proposer pour être fusillée à la place des otages. Le major Von HASSELBACH l'a remerciée." On apprend un peu plus loin que, contrairement à celle de Mlle LANDOIS, l'offre de Mlle BENOIT a été transmise aux autorités supérieures par un Feldkommandant étrangement nommé Von und Zu BODMAN.
 
    Je ne vous raconterai pas ici la tragédie des Cinquante Otages de Nantes et de Châteaubriant. Les faits sont bien connus, ils appartiennent à l'Histoire. Je veux seulement, quelques instants, sortir de l'ombre où elles sont restées si longtemps cachées les silhouettes pâlies de deux femmes, mortes aujourd'hui probablement.
  Mademoiselle Landois, mademoiselle Benoit, personne ne sait plus qui vous étiez. Même les tueurs d'otages vous ont dédaignées, puisqu'ils ne vous ont pas exécutées, repoussant dans l'oubli votre bel héroïsme.
  Je veux, ici, quelques instants, si peu d'instants, parler de vous dont on ne parle plus. Je veux vous montrer tout d'abord, douces ou hardies, naïvement orgueilleuses, relisant les journaux, vous préparant toute une nuit au devoir, et puis vous levant le matin du grand jour, certaines qu'il le falllait...
  ... Dans les rues silencieuses de la ville terrifiée, vous avez marché solitaires, frissonnantes et rapides. Vous avez hésité cependant, devant le porche sombre de la Kommandantur. Une aube rouge grelottait aux arbres de la place, vous vous êtes avancées toutes pâles. D'une voix résolue qui tremblait bien un peu, vous avez abordé ces soldats jeunes, rudes, et si grands devant vous qui, mitraillette au poing, gardaient la porte noire. Quand vous avez demandé à voir leur chef, ils vous ont regardées avec mépris, et vous avez soutenu leur regard. Vous avez continué votre marche, encadrées d'hommes en armes, jusqu'au bureau du major. Contre son habitude, sans doute, il vous a fait asseoir, surpris par ce grand halo de terreur et de force qui rayonnait sur vos visages minces. Vous avez récité en tremblant votre déclaration, si courte, apprise par coeur comme un grand rôle tragique, tandis qu'un soldat silencieux frappait vos mots à l'encre noire sur une machine aussi cliquetante qu'un convoi. C'était fini. Vous avez relu calmement le papier qu'on vous tendait, puis vous l'avez signé d'une main ferme. Les hommes en armes vous ont raccompagnées jusqu'à la porte noire. Il vous a semblé, dans les couloirs confus, entendre derrière les portes de longs cris étouffés, la peur vous a reprises, vous ne saviez plus avancer. On vous a poussées sur la place, effarées, des gens inquiets vous regardaient derrière les volets qui s'ouvraient lentement. Vous avez regagné votre modeste logement. Et longtemps vous avez attendu, résolues. Quand enfin vous avez su que tout avait été inutile, vous avez pleuré, ou peut-être prié, épuisées.
   Voilà, mademoiselle Landois, mademoiselle Benoit. Je crois que ce fut tout.
   L'Histoire est ainsi faite qu'elle devait effacer vos noms d'humbles héroïnes. Un fonctionnaire méticuleux vous sortit de la nuit pour vous ranger aux lignes obscures d'un mémoire oublié. Et moi, qui vous admire, je ne peux aujourd'hui vous hisser qu'au bref éclat de cette page promise à la disparition.
   C'est face à l'oubli et sur fond de néant que, presque tous, nous devons accomplir notre tâche. Je crois que vous le saviez, mademoiselle Landois, mademoiselle Benoît.
  

Publié dans Nantes

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Le vrai du faux

Publié le par Carole

porte trompe-l'oeil
 
Au n°3 de la place Fernand Soil la porte est toujours close. Bien sûr, me direz-vous, puisque c'est, comme le vieux téléviseur abandonné sur le seuil, comme la pierre de taille et les joints de ciment de l'encadrement, comme le numéro 3 lui-même, si joliment gravé dans la pierre qui n'existe pas, un trompe-l'oeil, une illusion, un faux.
Et pourtant... pourtant, regardez de plus près : sous la fausse porte en trompe-l'oeil il y a bien une vraie porte. On en distingue très nettement les gonds et les clous, et le dormant de bois est encore bien visible sous la peinture brune. Si vous observez mieux encore vous distinguerez même sur la droite le départ d'une seconde porte, parfaitement authentique elle aussi, et que le peintre a emmurée dans les pierre d'illusion de sa fresque. Bien sûr les poignées de cuivre sont fausses, et il n'est plus possible d'ouvrir, de la rue, aucune de ces deux portes, définitivement bloquées sur leur mystère.
Quant aux belles grilles de fer forgé, toutes sont feintes, évidemment, mais les grilles d'aération, laides et noires, habilement masquées par le dessin, sont bien vraies, tout comme ce bout de table que la photo a arraché à la terrasse du café voisin. Et, sur le téléviseur inexistant, le compteur électrique, avec son tag négligemment tracé, est, croyez-moi, des plus réels, malgré sa face blanche et ses coulures de peinture. Car ce numéro 3 qui n'existe pas est tout de même habité par des gens qui se chauffent et s'éclairent, comme nous.
 
Le vrai, le faux, s'entremêlent étroitement pour tisser, trame et chaîne, la tenture du décor. Le faux s'appuyant sur le vrai, le vrai se défaussant sur l'illusion, et tous deux finalement s'entendant à merveille, pour créer ce trompe-l'oeil admirable, cette porte bien close sur ses ombres, qu'on a coutume d'appeler Vérité.

 

Publié dans Nantes

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Ecran noir

Publié le par Carole

Ecran noir, page blanche... Il y avait longtemps
Que mon ordinateur comme un âne fourbu
Renâclait, s'épuisait, marchait à reculons.
Il vient de rendre au vide sa pauvre âme têtue.
Pardonnez, mes amis, si je m'absente un peu,
Je reviendrai vers vous quand une autre machine
Voudra bien consentir à marcher de nouveau
Sur cette vaste toile où j'ai tendu mon fil.

 

Publié dans Fables

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Poissons rouges

Publié le par Carole

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Je suis passée hier place du Bouffay, et j'ai vu que Liopé "liquidait". Installée là depuis des décennies, l'animalerie déménage en banlieue, chassée du centre-ville par la marée des restaurants, des cafés, des terrasses et des banques. 
Nous ne verrons plus les grands aquariums lumineux où se reflétait la vieille place, nous ne verrons plus la mer allée de la Tremperie, nous n'achèterons plus de poissons en avril en rêvant à la Loire sous nos pieds enfermée dans sa fosse.
C'est ainsi, tout doit disparaître, et les vieilles boutiques de Nantes sombrent dans nos mémoires comme navires à voiles ensablés dans l'estuaire.
 
Quittant pensivement Liopé, je me suis souvenue de mon poisson rouge d'autrefois. Il n'avait pas été acheté chez Liopé, celui-là, mais quelque part à Blois, dans une boutique également disparue.
Mes grands-parents me l'avaient offert pour mes quatre ans, et c'était un ravissement de le voir, virant dans son bocal, frétiller, s'agiter, s'éclairer, petite flamme vive.
Quand j'ai eu cinq ans, que je suis entrée à l'école, je l'ai vu grandir, s'épanouir, tournant plus posément, regardant le monde par la vitre, à mesure que la raison lui venait.
Bientôt j'ai eu six ans. Dans son bocal terni, il a commencé à mûrir, à engraisser, à ralentir, allant son train de poisson gras sans plus chercher ailleurs.
Et puis, je ne sais comment, j'ai eu sept ans et je l'ai vu vieillir, ne remuant presque plus, pâle et enflé comme un pauvre hydropique.
J'avais huit ans quand il est mort. J'ai bien pleuré, et puis j'ai eu neuf ans...
 
Dans son bocal mon poisson rouge avait fait le tour du temps, tout doucement, comme une aiguille aurait fait son tour d'horloge.
Et moi j'avais appris, tout doucement, ce que c'est que la vie, tournant dans son bocal comme petit poisson, juste pour faire le tour, avant de disparaître, de l'humble goutte d'eau qui abrite le temps.
 
 
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Publié dans Nantes

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Songe

Publié le par Carole

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Il ne passerait plus ni par la porte de corne, ni par la porte d'ivoire. Il ne voguerait plus sur l'océan des nuits semé d'étoiles en fuite... Quelqu'un l'avait couché en lettres antiques sur la coque dépeinte d'un bateau pourrissant. 
Lui, derrière son grillage, il appelait comme un vieux prisonnier...
Beaucoup passaient indifférents. Quelques passants tournaient la tête, d'autres même s'arrêtaient, tentés.
Songe...
Puis chacun reprenait son chemin. Il y a tant de grillages en ce monde. Tant de songes enfermés.
 

Publié dans Fables

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Anaïs

Publié le par Carole

    Mme Dutilleux s'y reprit à deux fois pour lire l'article. Elle avait dû mal comprendre. Il devait y avoir une erreur. Ou alors c'était une coïncidence. Une homonymie. Un de ces hasards extraordinaires... Anaïs ! [...]
 
Suite du récit à lire sur mon blog de récits et nouvelles cheminderonde.wordpress.com

 

 

 

Publié dans Récits et nouvelles

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