Quand il entra dans son bureau, il fut d'abord frappé par le silence. Par l'inhabituelle densité du silence. Toutes les machines étaient à l'arrêt. Et désormais, tous les employés étaient partis. Il ne restait que le vieux gardien qui faisait péniblement sa ronde, et qui l'avait salué de loin, lorsqu'il s'était garé à l'entrée des bâtiments de l'administration.
On était encore en mars mais il faisait très beau. Un de ces beaux temps magiques et légers de printemps précoce qui l'aurait attiré irrésistiblement vers la mer, autrefois [...]
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Trace d'enfance

Pays natal

Un après-midi à la campagne
Du mérite ? oui, j’en ai eu, évidemment… Une chaire d’université, et une oeuvre, oui… ce qu’on appelle une oeuvre… ajoutons quelques prix prestigieux, la notoriété, peut-être même la célébrité… Un beau parcours, pour une fille de petits commerçants… mes parents auraient été fiers, comme vous dites, s’ils avaient vécu assez pour le voir. Alors, oui, c’est sans doute ce qu’on appelle réussir. Ce que j’aurais appelé réussir, autrefois, ce que j’aurais souhaité par-dessus tout. Mais, voyez-vous, l’âge nous éloigne de nous-mêmes, et fait de nous les juges les plus sévères de ce que nous avons été. Plus sévères, sans doute, qu’aucun Minos ne le sera jamais, au soir de la pesée des âmes, car nous n’oublions rien. A quoi a-t-elle tenu, au fond, ma réussite ? [...]
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Le dernier, le premier
Naoto Matsumura, "le dernier homme de Fukushima", est actuellement en France.
Vous pouvez l'écouter sur ce lien (par exemple) : link
A cette occasion, je réédite sur ce blog le compte-rendu que j'avais fait en 2013 du livre qu'Antonio Pagnotta lui a consacré, Le Dernier Homme de Fukushima (éditions Don Quichotte).
On ne sait quel sentiment l'emporte, quand on achève le livre qu'Antonio Pagnotta a consacré à Naoto Matsumura, l'ermite fermier de la préfecture de Fukushima.
La révolte, contre TEPCO (Tokyo Electric Power Company) et sa gestion effarante, tout d'abord de ce qu'on appelle la prévention des risques, puis de la catastrophe qui a effectivement frappé, en mars 2011, après le tsunami, le réacteur I (Daï ichi).
La stupeur, ou la pitié peut-être, devant la passivité, et la docilité sans doute plus résignée que confiante, de la population japonaise.
L'effroi, lorsqu'on songe au sort qui attend les victimes - par exemple, dans les villes limitrophes de la zone d'évacuation, arbitrairement déclarées exemptes de contamination, ces enfants qu'on n'a pas déplacés, auxquels on n'a pas distribué de pastilles d'iode, et dont beaucoup déjà présentent des kystes et des nodules bénins de la thyroïde.
L'admiration, devant le courage du reporter se risquant, pour savoir, et pour faire savoir, dans la zone interdite et si dangereuse.
L'enthousiasme, à découvrir le combat de Naoto Matsumura, la force qui l'anime, son effort surhumain pour sauver les animaux et les terres de son pays natal, dans la plus totale solitude.
Et l'espoir, l'espoir surtout. Car ce dernier homme de Fukushima est en réalité le premier, celui qui ouvre le chemin, celui qui peut nous aider à passer de l'autre côté, de ce côté où l'humanité, au terme de son parcours, cesserait de vivre en colonisatrice et prédatrice de son environnement, pour trouver enfin cette harmonie avec la nature qui couronnerait l'effort millénaire vers ce qu'on a pu appeler le progrès.
Dans son livre, Antonio Pagnotta nous raconte les trois séjours qu'il a effectués, entre juin 2011 et novembre 2012, guidé par Naoto Matsumura, dans la zone interdite des vingt kilomètres autour de Daï ichi - le (réacteur) I. Sa description, aussi lucide qu'hallucinante, nous fait comprendre toute la violence du désastre nucléaire subi par le Japon, dont la presse occidentale parle si peu, et que bien des Japonais même, mal informés, continuent de sous-estimer. Mais le vrai sujet du livre est Naoto Matsumura lui-même, Naoto le résistant.
Descendant d'un moine shinto, cet homme s'est donné à tâche de panser et de faire revivre sa terre natale, lourdement empoisonnée et désertée après l'évacuation. Il sait quels risques il encourt, qu'il est désormais un hibakusha, un irradié, un paria, et que le césium accumulé dans sa chair et ses os viendra nécessairement à bout de ses forces, pourtant, il a décidé de résister, à sa façon. Par respect pour la nature, toute entière sacrée selon la pensée shintoïste, qui croit tous les êtres vivants égaux en noblesse et en importance, il est revenu dans sa ferme, malgré l'interdiction formelle des autorités et au prix de grands sacrifices. Sans électricité, sans eau, démuni de tout sauf d'un peu de carburant pour son camion et des dons que lui font parvenir quelques sympathisants, il a recueilli ou nourri les animaux survivants, il a remis en culture des terres abandonnées. Et il se consacre désormais à l'élevage d'un grand troupeau de vaches dont les bouses fixent le césium des plantes digérées - ainsi pense-t-il pouvoir éliminer, peu à peu, le césium passant du sol aux bouses qu'il incinère - c'est infiniment lent, mais la patience de Naoto Matsumura est sans limite, comme celle de la nature qu'il vénère.
Naoto Matsumura n'est pas un théoricien, pas un penseur politique, il n'est même pas, malgré son acharnement à poursuivre TEPCO, un militant anti-nucléaire, il est moins encore un ennemi de la science, sur laquelle il essaie, autant qu'il le peut, et notamment par ses contacts réguliers avec le docteur Masamichi Yamashita, de l'agence spatiale Jaxa, d'appuyer ses projets.
Il est seulement, je crois, de ces hommes héroïques et simples qui nous tracent à tous le chemin pour après : n'accepter ni la peur ni le désespoir ni le déni, face au désastre annoncé (et peut-être ne sera-t-il pas ce désastre-là, cet enfer nucléaire qui s'est logé en quelque sorte expérimentalement, à Fukushima, peut-être prendra-t-il une toute autre forme, ou même plusieurs formes simultanées). Lutter, calmement, fermement, ne pas renoncer, et, avant tout, retrouver le lien qui nous unit aux bêtes et aux plantes, qui nous fait hommes parmi le monde et avec le monde. Au bout de ce parcours est notre chance ultime, non seulement de survie, mais tout simplement d'humanité.
Antonio Pagnotta a appelé Naoto Matsumura le dernier homme de Fukushima. Je préfère l'appeler, quant à moi, le premier homme. Le premier homme du monde d'après.

Harukaze (vent de printemps)

Une larme de sèvesang

Sur les falaises
Il nous avait dit qu'il était de Grand Village... Si vous pouviez nous donner quelques renseignements ? Nous aimerions tant le revoir.. nous souhaitons lui parler... Vous comprenez, c'est cette année la dernière fois que vous venons... Nous avons séjourné à Belle-Ile tous les étés depuis cinq ans... mais nous avons décidé cette année de ne plus revenir... Et nous partons demain, voyez-vous, demain matin. [...]
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En passant

Printemps
