L'arc-en-ciel
Zone industrielle de Nantes-Est, le 2 novembre 2012
J'étais arrêtée au feu rouge de la D723 - celui qui est si long, à l'entrée de la rue qui mène, à gauche, dans la zone industrielle. Soudain, par-dessus la route trempée de pluie, je l'ai vu apparaître, merveilleux : l'arc-en-ciel.
Splendide et chatoyant, posé comme un diadème dans la grise fourrure des nuages, il s'ouvrait au soleil, éventail précieux d'une dansante averse. J'ai démarré au feu vert et je l'ai suivi. Derrière les pylônes de la ligne à haute tension, il me faisait signe de tout son grand corps éblouissant. Plus loin, bondissant sur les toits de tôle des entrepôts de la zone industrielle, il m'appelait encore. Par-dessus la prison de la rue de la Mainguais, je l'ai vu s'éployer comme l'Aube de Rimbaud, immense et scintillant dans sa traîne irisée. Puis il m'a échappé. J'ai continué ma route, obstinée. Alors, une dernière fois, alors que je passais près des citernes du dépôt de gaz, il m'a souri tristement. Tout pâle et battu de pluie, il est resté un instant accroché aux barbelés. Puis il a disparu. Tout est redevenu béton gris, noir bitume.
Je ne lui en ai pas voulu. Il m'avait déjà guidée loin dans la banlieue, aussi loin qu'il lui avait été possible.
La beauté, quand on la croise sur un chemin sans grâce, ne transforme pas le chemin, mais elle nous y conduit. De sa main de rosée, de ses doigts de lumière, elle nous fait signe d'avancer. Un peu plus loin...