Pâques
Tout à l'heure, je traversais la place Royale. Il faisait triste, il faisait foule, il faisait gris - avril revêche attendait son printemps en faisant les cent pas.
J'ai d'abord vu cet homme qui dessinait sur le trottoir, avec ce qui m'a bien semblé être du marc de voyant, une de ces fleurs immenses qui dans les dessins d'enfants sont comme des soleils montés en graines.
Un peu plus loin, il était là, celui qui écrivait, assis dans son recoin. Personne ne le remarquait, et lui ne remarquait personne, tandis qu'il posait lentement sur son cahier, l'un après l'autre, les mots qu'il choisissait.
Une fanfare joyeuse tintamarrait quelque part son sacre du printemps. Il écrivait, il écrivait toujours, patient comme un poète.
Et... comment l'expliquer ? Vraiment c'était si ténu : il y avait quelque chose, cet après-midi, sur cette place, dans ce samedi d'avril frisquet. Il se passait quelque chose. De très léger de presque imperceptible.
Oui, je crois bien que c'était lui, l'esprit de Pâques, qui se glissait parmi nous. Incognito. Bien là pourtant.
L'esprit de Pâques, léger comme un soleil d'enfant roulant parmi les fleurs.
L'esprit de Pâques...
Lorsque tout est possible, et qu'on y croit vraiment, et que tout va pouvoir commencer, bientôt, dans le coup de trompette du printemps revenu.