Passage Pommeraye - Nantes, 2 juin 2014
Au Passage, les hasards de la restauration avaient fait ressurgir hier cette affiche, sous un vieux miroir déposé. En quelle année l'avait-on collée là ? En 1843, quand on avait ouvert les premières boutiques, ou en 1848, quand la crise avait tout englouti ? Fantôme déchiré sur sa croix de bois sale, elle était aussi émouvante qu'une enseigne de Pompéi :
MAGASIN
A
LOUER
PRÉSENTEMENT
Présentement présentement présentement, le vieux mot palpitait sur le bois comme un coeur encore vivant dans les plis du papier presque intact.
Présentement présentement présentement...
C'est si peu de chose, le présent, on le gaspille, on le dissipe, on l'imprime, on l'oublie, on le voue sans remords au commerce, aux efforts qui s'effacent, au néant agité des affaires humaines.
Pourtant, que le plus humble lambeau de ce présent disparu parvienne intact jusqu'à ce nouveau présent dérisoire qu'on appelle aujourd'hui, il en devient si précieux qu'on pourrait en pleurer. C'est qu'il a traversé le temps, ce mystère des mystères.
Et que présentement présentement présentement, ils sont moins que poussière, ceux qui croyaient au présent comme on croit en soi-même.