Seul
Il devait se sentir bien seul, l'homme en gris.
C'était un peu après six heures, hier soir, pendant "le" match. Il s'était attablé tout gris près d'un arbre tout gris, sur l'esplanade grise, à la table grise d'un petit café gris démuni de tout téléviseur et par conséquent désert. Un peu plus loin, dans le café voisin magnifiquement doté de trois écrans, il y avait foule et c'était l'été brésilien.
Loin des jeunes gens au maillot coloré qui se battaient pour un ballon, loin des groupes d'amis qui s'étaient rassemblés partout, loin des cris de victoire et des hurlements de dépit, loin des bonheurs criards et des orages télévisés, il devait se sentir bien seul, l'homme en gris.
"Ils" ont perdu finalement, et "nous" avons perdu avec eux, paraît-il.
Lui, je crois qu'il avait perdu depuis longtemps, mais qu'il aurait bien aimé pouvoir jouer encore un peu. Dans un film en couleurs.