Rubik's cube
Ce qui m'a étonnée, ce n'est évidemment pas de découvrir, au pied de l'échelle, au lieu du sourire fatigué du clown, un Rubik's cube - car depuis longtemps je sais que l'étrange est au coin de la rue, et que de mystérieuses cohortes de rêveurs s'affairent dans cette ville à transformer en chemins de traverse ou de ronde nos parcours les plus quotidiens. Non, ce qui m'a étonnée, c'est que le Rubik's cube - vous savez bien, cet infernal casse-tête qu'on ne peut résoudre qu'après des études approfondies de mathématiques - était résolu.
Au-dessus de l'échelle, toute la folie du monde - les embouteillages, les panneaux multidirectionnels avec leurs injonctions contradictoires, et la Tour de Bretagne, notre petite Babel de Nantes, se dressant en habits de fusée vers le ciel sombre et lourd... En bas, dans l'éboulis d'arbustes et de pierres, au bord du fleuve, le casse-tête bien en ordre, définitivement résolu, scellé d'un cachet rouge en forme de flamme heureuse...
Et si l'esprit de fantaisie était, en effet, la solution à ce casse-tête insoluble, à cette énigme sidérante qu'est devenue l'existence des hommes ?
S'il était la petite flamme, le flambeau léger qui ne peut s'éteindre, et d'âge en âge se transmet, pour nous donner ce qui vaut bien plus que la vie, le goût de vivre et la joie d'être au monde ?