Réédition...

Publié le par Carole

    Puisque l'histoire semble n'être qu'une perpétuelle édition des mêmes nouvelles trop souvent resservies qui nous abîment la pensée, et des mêmes haines rerancies qui nous brouillent le coeur, je peux bien, moi aussi, éditer ce texte de février 2008...
   Le voici donc, je vous le recopie, ce "papier" ressurgi, hélas ! dans ma mémoire veillée par le très vieux et si triste refrain qu'on nous propose encore en guise d'actualités.
 
"Question d'interprétation
 
    Dans le numéro de Vingt Minutes Nantes qu'on vient de me distribuer gratuitement, sur le quai du tramway, je lis ceci :
 
   "Une Roumaine de 30 ans [comprendre, évidemment : "une Tzigane"] a été arrêtée mardi au Carrefour de *** , a indiqué hier la police, après avoir menacé de frapper un vigile avec son bébé de 11 mois. Soupçonnée d'avoir volé des produits, elle a brandi l'enfant au-dessus de sa tête "comme si c'était une arme, a rapporté le vigile, qui s'est dit "très choqué". La suspecte s'est ensuite introduite samedi dans le foyer où son enfant avait été placé, pour tenter de le récupérer. Sans succès".
(http://www.20minutes.fr/nantes/212027-Nantes-Elle-menace-un-vigile-avec-son-bebe.php)
 
   Et, tout en me hissant dans le tramway bondé, derrière quelques "Roumaines" sans manteau et chaussées de simples sandales malgré le froid très vif, je ne peux m'empêcher de penser qu'on aurait pu écrire l'article autrement...
 
    "...Une jeune mère tzigane, arrêtée comme à chacune de ses visites au supermarché - ces Tziganes, tous des voleurs, des malfaiteurs et des sans-coeurs - par un vigile soupçonneux, a brandi au-dessus de sa tête son bébé, comme un bouclier, avant de se laisser interpeller par des policiers appelés en renfort. On n'a trouvé sur elle aucun objet volé, mais, sur le témoignage du vigile, on lui a retiré son enfant, qu'on a placé dans un foyer où il lui faudra désormais grandir, seul, orphelin dans un monde étranger – qu'importe qu'importe puisque dans sa famille il serait devenu un voleur un malfaiteur et un sans-coeur –. Sa mère, le lendemain, a frappé à la porte du foyer où son enfant pleurait tout seul. On ne lui a pas ouvert. On l'a durement renvoyée. On a jugé bon d'informer les journaux, afin que la femme ne puisse se plaindre à personne."
 
    Il est vrai qu'un tel récit déplairait aux lecteurs. De Nantes ou d'ailleurs. Qu'il leur déplairait même beaucoup. Et puis, si on commençait à tout réécrire, le monde changerait de visage – un changement insupportable, toutes nos idées renversées, bouleversées, sur tout... sur tout ce que nous connaissons ou croyons connaître, d'autres mots, d'autres noms...  un autre monde, je vous dis. Et ça, personne n'en veut. Ça se conçoit.                
(11 février 2008)"
 
romnia.psd.jpg
Campement "roumain" - Rezé - 2012
 
 

Publié dans Fables

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C
Tout est une question de regard !
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L
hélas, ton texte n'a pas pris une ride !
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A
Oui, j'en ai également fait l'expérience et eu de tristes surprises de la part de personnes que je croyais connaître, cela permet de faire un "ménage" très sain autour de soi!
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C
<br /> <br /> Je n'en veux pas à tous ceux qui sont "sous influence", mais un réveil s'impose<br /> <br /> <br /> <br />
A
Tout de même, d'une certaine façon je me sens coupable vis à vis de toutes ces personnes: Rroms, réfugiés de tous les pays, naufragés, SDF etc, tous victimes du rejet de nos sociétés. Il me semble<br /> que si les politiques de tous bords sentaient la lourde réprobation, la colère de ceux qui ne se laissent pas contaminer par l'air ambiant très nauséabond, ils n'oseraient pas agir ainsi.<br /> Ce qui se passe en ce moment devrait soulever des torrents d'indignation dans les rues : les populations rejetés ne représentent qu'un ridicule pourcentage par rapport à la population européenne,<br /> et c'est aussi, je veux encore le croire, une minorité qui les rejette...alors qu'attendons nous pour nous faire entendre?
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C
<br /> <br /> Les politiques qui exploitent ce racisme ne s'ntéressent qu'au pourcentage de voix en plus qu'ils pourront récolter aux élections, et la "lourde réprobation" et "la colère" leur sont bien<br /> indifférentes, du moment que leur carrière peut atteindre son zénith. Et il ne sera pas facile de se faire entendre, car, maintenant, après cette campagne massive menée par deux gouvernements<br /> successifs, c'est lorsqu'on "ose" parler pour les Roms qu'on subit la réprobation générale (j'en ai fait bien des fois l'expérience). L'espoir peut venir des jeunes, même si le mouvement des<br /> lycéens est très naïf et ne peut déboucher sur rien, il montre au moins leur rejet de ces idées violentes qui nous rappellent tristement les années 30.<br /> <br /> <br /> <br />
N
Si tout le monde faisait, comme toi, ce travail de réflexion. Savoir interpréter autrement ce qu'on nous sert sur un plateau, comme pré mâché. Comme si c'était ce que nous attendions
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E
pour le moins possible de subjectivité, sans doute faudrait il ometttre adjectifs, adverbes, et comparaisons ("comme une arme" ou "comme un bouclier" )
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C
<br /> <br /> Mais je ne cherchais pas à éliminer la subjectivité, juste à donner une interprétation "différente".<br /> <br /> <br /> <br />
R
Je ne sais si l'Histoire est un "éternel recommencement" mais ce que je sais, c'est que la nature humaine - vous avez dit humaine ? - s'offre sempiternellement les mêmes travers ...
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C
<br /> <br /> Oui, et ceci explique cela, sans doute.<br /> <br /> <br /> <br />
A
Quelle honte cette communauté stigmatisée!Quelle honte ces gens soi-disant de gauche qui ont une politique de droite! Le bleu marine que redevient à la mode!Je suis écoeurée...<br /> Tu as raison et ton exemple est frappant:le traitement de l'actualité a le pouvoir de changer notre vision des choses.<br /> Garde-le bien sous le coude, cet article: il ya fort à parier que tu t'en reservira encore!
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C
<br /> <br /> Oui, je crois que cette question dépasse les clivages politiques convenus (et on le voit bien, car des gens "de droite" sont choqués, tandis que des gens "de gauche" adoptent sans complexes des<br /> positions racistes). Ce n'est pas à mon avis une question "politique" (même si on peut la récupérer dans ce sens) mais vraiment une question philosophique et morale. Ce qui m'indigne, c'est qu'on<br /> puisse dire "les Roms", en général, et leur attribuer des tares collectives. Incroyable régression après des siècles de réflexion philosophique : car c'est cela le racisme, c'est quand<br /> on attribue des caractéristiques (généralement négatives bien sûr) à un groupe au lieu de considérer des individus. Le contraire de l'humanisme qui voit en chaque homme... un homme, avec<br /> ses particularités, ses qualités, ses défauts aussi.<br /> <br /> <br /> <br />
J
Que dire... il ne fait pas bon être Roumain par chez nous, d'ailleurs les nomades sont vu d'un mauvais oeil, tous dans le même panier, bonne question....
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C
<br /> <br /> Oui, j'ai fait une réponse assez longue à Almanitoo à ce sujet. Je te laisse voir, sinon je vais me répéter.<br /> <br /> <br /> <br />
A
Les exemples se multiplient et les populations bien nourries de nos contrées s'affolent de devoir partager, alors on les rassure dans les journaux et ailleurs pour les conforter dans leur bien être<br /> et les déculpabiliser.<br /> Il est tellement plus facile de faire passer ces populations, d'ou qu'elles viennent, pour des voleurs de poules que de chercher la vérité!<br /> J'ai entendu hier un responsable, maltais je crois, dire avec une ironie froide et rageuse qu'il ne pouvait pas croire que l' Europe allait être capable de résoudre sa crise financière avant de<br /> résoudre sa crise humanitaire.<br /> Eh bien si, hélas, mais j'ai également vu l'émouvante solidarité de gens qui partagent le peu qu'ils ont avec encore plus démunis qu'eux.
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C
<br /> <br /> Oui. je trouve sidérant qu'on fasse actuellement d'un groupe finalement peu nombreux le bouc émissaire absolu : pas de jour sans un nouveau méfait imputé aux Roms dans les journaux,"ils sont<br /> incapables de s'intégrer," "le père de Léonarda a tous les vices" etc. Il s'agit bien sûr de masquer les vrais problèmes. Et ça marche toujours de remuer la méfiance séculaire des "sédentaires"<br /> envers les "nomades". On est encore dans l'univers de Notre-Dame de Paris, deux siècles après Hugo, c'est triste...<br /> <br /> <br /> <br />
J
Poignant poignard, j'ai mal.
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