Les veines de l'arbre
Dans ce parc on avait dessiné en rouge très vif, pour l'instruction des passants, le parcours des racines du vieil arbre.
Sur le sol gris, dans l'herbe verte, s'étirait un fouillis sinueux de traits pourpres, un réseau compliqué d'artères, de veines et de veinules courant sur les pelouses, se croisant aux fleurs des parterres, s'égarant parmi les fourrés, ressurgissant au soleil des allées.
Au pied de l'arbre de bois et de feuilles, un labyrinthe de racines illuminées, un immense arbre de sang palpitant, redessinaient l'espace aux couleurs de la vie jaillissante et multipliée.
C'était aussi beau que ces écorchés debout comme des fontaines, somptueusement nus, habillés de leurs seuls vaisseaux sanguins, un gros coeur rouge à la boutonnière, sur les pages blanches de mon livre de sciences, autrefois.
Arbres, il me plaît de penser qu'un même sang court dans vos veines et dans les miennes.
Qu'une même marée claire et tiède monte et reflue sans trève, d'un bord à l'autre de la vie.
Et qu'une même sève, sur terre et sous la terre, fait battre le coeur unique de tous les vivants.