En passant
Je viens d'ailleurs.
D'un lieu où chaque pas me renvoyait à moi-même, à mes aïeux, à mes souvenirs pesant comme des taies sur mon regard.
Ici, dans cette ville - que par facilité j'appelle Nantes - qui est peu à peu devenue pour moi la Ville, je n'ai pas de morts enterrés, pas d'enfance, pas de parents.
J'y avance sans chaînes, sans mémoire, sans certitudes et sans parcours tracés, les yeux ouverts et aux aguets, comme on doit aujourd'hui avancer dans les villes.
Un jour, il faudra bien que je parte, sans me retourner.
En attendant, j'essaie seulement d'être là, d'être là dans la ville comme je suis au monde, juste un instant, par hasard, en passant, avant de disparaître.