Confiance
On imagine un ancien café, un bistrot de quartier où se réunissaient de vieux amis, pour jouer à la belote en buvant du pastis, et puis parler presque sans mots.
Ou alors le petit bureau sombre d'un infime courtier d'assurances, l'écroulement des dossiers fatigués et des toiles d'araignées, autour d'un vieux bavard prêt à tout arranger.
Ou bien encore une boutique pour dames, où on aurait vendu du fil et des boutons, en bourdonnant dans l'ombre de pâles médisances, de lourds secrets d'alcôve, d'étroits soucis brodés et rebrodés, sur des canevas fleuris et des chemises à smocks, par d'humbles Pénélopes.
Mais qu'importe d'où elle nous vient, cette confiance, puisqu'elle nous vient de très loin, de bien plus loin que ces boutiques oubliées. L'essentiel est qu'elle rayonne encore dans la rue, soleil des bons matins.
On l'a repeinte et carrelée de frais, même on a soigneusement rebouché ses lézardes, et on les a décorées de faïence, pour qu'elle luise plus vive et se dresse plus ferme. On a frotté bien fort les étoiles de ses lettres, afin qu'elles brillent clair au grand ciel de nos vies.
Et la voilà, là-haut, qui proclame la foi, d'une belle avancée naïve, ronde et droite à la fois.
Confiance, tu ordonnes le monde,
Tu es de toutes les promesses et de tous les espoirs.
On ne bâtit rien que sur toi.
Tu es le grain de sable dont on cimente les murailles et les ponts,
la mousse douce dont on tresse le nid aux branches de demain.
Mais c'est en toi aussi que s'enracinent toute douleur et toute erreur.
Tu fais saigner les coeurs que tu trahis.
Et toi, méfiance, tu rampes alors sur les murs qui s'effritent,
Et toi, défiance, tu craches ton venin sur ce qui disait oui.
Sur ce mur tendre et jaune comme du beurre, confiance, reste ainsi, je t'en prie, toute claire toute bonne,
comme au premier instant d'Eden, comme au premier mot échangé, comme à la première main serrée.
Confiance, je t'aime et veux toujours t'aimer.