L'espoir
J'aime beaucoup cette enseigne. Je la connais par coeur, depuis des années que je passe, en bus, juste à sa hauteur.
Longtemps, quand la boutique périclitait, elle n'a été que l'Esp. Puis on a repeint les lettres, on a posé des tubes de néon neuf. Et l'espoir s'écrit maintenant comme une fable, dans son décor de vert feuillage et de bleu ciel.
Le L d'abord s'élance ferme, un peu irréfléchi peut-être, avec cette apostrophe qu'il lance du pied devant lui comme un petit caillou. Le E le suit, brave soldat, poings en avant, l'air décidé, menton carré. Mais voilà que l'incertitude saisit le S, qui s'alanguit, qui freine un peu, et - malheur ! que le P trébuche, qu'il est sur le point de flancher tout à fait, de tout abandonner. Il va rouler au gouffre, mais le O, compagnon de cordée, le retient dans sa chute. Courageux O qui fait face, dos rond, solide comme un roc. Quand au i, il est confiant, il sait que tout va s'arranger, et il va droit tout bonnement, sans retarder sa route, sans regarder derrière lui. Le R enfin ferme la marche, énergique, jambe ferme mains dans les poches, sur le chemin qui s'élargit, vers demain.
Pouvait-on mieux calligraphier l'espoir, qui lutte, doute, et vit, et va ?