Immobilité
Quand j'ai pris hier cette photo, j'ai d'abord eu un doute : étions-nous bien en 2014 ? Et si le temps s'était immobilisé en 2004 ? Et si cette affichette avait été clouée sur l'aiguille rouillée des années arrêtées ?
Un doute, léger frisson... J'ai relu le papier oublié sur la porte bien close :
"Fermeture définitive de la boutique le 31 décembre 2004".
C'était donc ainsi... il y avait dix ans que la boutique dormait là, figée dans son linceul de poussière... En vain la rue vivante reflétait sur la vitre ses lumières et ses séductions toujours renouvelées : le vieil étal endormi refusait de rouvrir ses yeux las. Et les trésors pâlis d'un passé mort attendaient dans le gris, spectres poudreux s'effaçant peu à peu.
N'en va-t-il pas de même de nos mémoires ? On voudrait arrêter le temps, en figer l'éclat bref derrière une vitre éternelle, mais la poussière des heures tombe lentement sur la vie comme une neige grise, recouvrant le passé qui s'éteint, tout doucement, tandis que l'ombre vient.