Hot

Publié le par Carole

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L'incendie s'est déclaré en 1962, quand des ordures brûlantes sont entrées en contact avec la couche de charbon qui se trouve sous la ville. Les autorités ont tenté en vain d'éteindre l'incendie et celui-ci s'est propagé à tout le réseau des anciennes mines de charbon.
 Le Journal
 
 
Il paraît qu'il y a, quelque part en Pennsylvanie, une ville qui brûle depuis 1962.
Il paraît. On le dit dans Le Journal.
Pas une ville en flammes, haute et flamboyante dans l'incendie comme une cathédrale, non, une ville qui se consume sans gloire et sans bruit, une ville flottant sur ses cales enfumées,  une ville mourante assoupie sur son coeur brûlant, une ville tranquille lovée sur ses poumons ronflants, une ville couchée sur ses veines de charbon allumées, une ville minière qui fut prospère et confiante, et qui brûle en-dedans, doucement,  sans douleur - et les rues se fondent et se fissurent, et les maisons se noircissent et s'écroulent, et les animaux tombent en marchant, et les habitants s'asphyxient, lentement, doucement, depuis cinquante ans.
On l'appelle Centralia. Elle brûlera encore ainsi deux cents, trois cents ou cinq cents ans, mille ans peut-être.
On dit dans le Journal qu'il y a, ailleurs, d'autres villes semblables à Centralia, qui se consument indolentes, sur leurs richesses en feu, sur leurs entrailles rougies de flammes, sur ce vide intérieur où passe le souffle ronflant d'une respiration mortelle.
Et moi je me demande s'il y a d'autres villes que celle-là, si Centralia n'est pas, tout simplement, depuis des siècles et pour des siècles encore, le centre obscur, la cale enfumée et brûlante où se meurt en silence notre monde flottant de modernes, notre bateau depuis si longtemps égaré, si Centralia n'est pas, tout simplement, La Ville.

Publié dans Nantes

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