Sapin
Nantes - Cours saint-André - 15 janvier 2015
Il n'était plus de saison, le pauvre vieux, maigre et piquant du nez sur son manteau d'aiguilles. Il n'y avait plus rien à faire. Mais on ne pouvait pas décemment l'abandonner sur le trottoir, devant l'appartement, à la vue des enfants. Alors on l'a porté là, discrètement, sur ce lit vert de mousse et d'herbes citadines. Juste au-dessus de l'Erdre, la vive enfouie luttant contre la nuit avec tous ses poissons.
Son petit pied de planches lui faisait une jolie croix de bois.
On nettoiera le cours, on l'enlèvera, bientôt, ce déchet de Noël, on le jettera comme il se doit, au feu ou au compost, triste paquet de joie morte.
Toutes nos fêtes finissent ainsi, au tas d'ordures, à la benne d'oubli.
Il doit bien y avoir quelque part, pourtant, dans les allées envahies de broussailles de nos regrets en friche, un cimetière des jours heureux, plein de fleurs, de vieux os et de songes, qu'on pourrait visiter, passant fidèle, et revoir sans pleurer.