Rythmes
Rue Lapérouse, au coin de la place Royale, deux musiciens s'étaient postés. L'un tenait une contrebasse, l'autre frappait d'un maillet un étrange piano, mi-harpe mi-xylophone, un cymbalum... - merveilleux instrument que j'avais vu, jadis, sur la scène de la "Folle Journée" où se produisaient les musiciens tsiganes du "Taraf de Haïdouks".
Les deux Tsiganes jouaient très vite, des airs au rythme étrange et changeant. Le rythme "boiteux" des Balkans... Et c'était curieux de regarder les gens qui passaient. Certains se mettaient à marcher plus vite, pas réguliers, l'un après l'autre, rythme binaire. D'autres, amoureux interprètes, commençaient à danser, valse à trois temps, rythme ternaire. Il y en avait aussi, bien sûr, qui n'écoutaient pas, et restaient immobiles.
C'est ainsi, en musique, et partout, et en tout. Il y a ceux qui préfèrent aller sur deux temps, marche en avant, droit devant eux. Ceux qui ne vont qu'en tournoyant, légèrement, trois temps de valse, trois temps de grâce. Ceux qui savent nous faire aller sur tous les rythmes. Et ceux aussi qui se contentent d'attendre, ou de dormir, indifférents.