Au dieu Vol
Sculpture de bois ornant une maison, rue de la Juiverie
Une inscription conservée au musée archéologique atteste qu'on avait dédié, jadis, la ville "au dieu Vol" - DEO VOL PRO SALUTE -
Les lettres penchent un peu, retiennent leur élan dans la pierre lourde où on les a gravées.
Je me demande qui il pouvait bien être, ce dieu Vol.
Je l'imagine, libre comme un oiseau, descendant l'estuaire au côté des hérons et des mouettes, par dessus les barques des pêcheurs de civelles, et rêvant à la mer.
Rusé comme un bandit, faisant marché de tout, même de chair humaine, attendant dans le port que s'en reviennent à lui de sombres cargaisons.
Léger comme un brin de bruine, et porté par le vent sur l'aile d'un jour gris.
Ou bien, semblable à l'homme aux yeux fermés de cette étrange enseigne - Hermès aux pieds en ailerons, glissant en songe de la terre au ciel et du ciel à la terre, pour que les mots d'en haut s'accomplissent en bas.
Tortueux et serpentin, mi-ange mi-démon, souriant avec grâce aux filles de la ville, mais désignant du doigt ceux qui mourront le soir, un dieu pas déplaisant, un peu inquiétant tout de même - comme tous les dieux.