Arthur Rimbaud sur les murs de la ville
"Tu as bien fait de partir, Arthur Rimbaud ! Nous sommes quelques-uns à croire sans preuve le bonheur possible avec toi." (René Char)
"[Patti Smith :] -Avez-vous pris le temps d'aller vous recueillir sur la tombe d'Arthur ? Moi, j'y suis allée. J'y ai croisé un jeune homme, il m'a demandé un baiser..." A quelques centaines de mètres de là, la pleine lune illumine ce cimetière. A l'intérieur, une boîte aux lettres à l'effigie d'Arthur Rimbaud. Le gardien reçoit toujours du courrier à son attention." (Le Magazine littéraire, 15 novembre 2011 http://www.magazine-litteraire.com/actualite/patti-smith-arthur-rimbaud-est-homme-tres-moderne-15-11-2011-33365)
On peut écrire à Arthur Rimbaud, si on veut.
J'ai l'adresse et je vous la donne :
124, avenue Charles-Boutet
08000 Charleville
C'est au cimetière, paraît-il.
Mais on peut aussi essayer de lui parler. Il suffit de s'en aller là où il passe, tout près de nous. Car, savez-vous, il est toujours vivant.
Et justement, hier, je l'ai rencontré sur les murs de la ville.
Dans la rue qui penchait vers la nuit, on le voyait à peine, dans le soir brun qui se drapait de pluie, il avançait sans bruit, et le monde s'éclairait au charbon de son front, au cerne de ses yeux grandissait le matin :
C'était rue de Strasbourg à Nantes et c'était simplement près de moi.
Arthur Rimbaud, tu es partout vivant, aux fissures des murs gris, dans les grains de l'obscur.
Tu es l'esprit léger de ceux qui parlent en rêve, quoi que pèsent les ombres,
et ton visage embrumé d'horizons,
aussi mangé de récifs et de mers
qu'une île aux cartes des marins,
toujours regarde
un peu plus loin.
Tu es l'envie de fuir qui est l'amour de vivre.
Comme l'enfance tu grandis
et tu ne peux mourir
quand tu t'avances vers le jour.
Fantôme respirant l'insolence et le ciel,
tu accroches aux remparts
le nid de poésie,
qui pépie vif et bleu
dans les coeurs
épuisés,
qui couve comme feu
sur les pensées
éteintes.
Arthur Rimbaud, tu ne nous as quittés
que pour nous revenir.
Dans cette nuit des hommes
montant leur garde triste,
tu grimpes pour toujours
le grand chemin de ronde
qui va vers le matin,
vers le soleil et vers la chair,
tout autour de la terre.
Arthur Rimbaud
sur les murs de la ville
rue de Strasbourg à Nantes,
c'était bien toi,
c'était ailleurs aussi.