Sur le chemin
Sur mon chemin du soir, cette feuille fanée
collée comme un timbre gris sale
sur le vélin vert frais d'une feuille vivante.
Le vent les balançait ensemble,
la verte encore bien verte, à peine piquée de rouille,
la grise tremblotante,
s'accrochant obstinée à cette autre moins vieille que mordillait sans hâte un hiver nonchalant,
se serrant déjà morte sur celle qui mourrait,
comme un timbre flétri qu'on aurait arraché aux lettres d'un défunt,
avant de le coller avec un soin d'avare
sur la page encore neuve d'un album endormi veillé par la poussière.
Sur mon chemin d'automne tout à l'heure
cette feuille têtue refusant de comprendre
que le temps seul écrit
ses messages de cendres
sur les pages vivantes
que de lents postiers d'ombre
aux guichets de l'oubli
envoient vers le néant.
Sur son chemin d'hiver
refusant de comprendre
sur mon chemin du soir
refusant
refusant
refusant
comme moi
comme nous
comme nous
tous.