Diane
Au château d'Anet, nous avons pu méditer sur le sort étrange de Diane de Poitiers, la plus belle, la plus puissante, et la plus audacieuse des femmes de son royaume. Celle qui, à force de perfection, voulut se faire déesse, allant jusqu'à boire chaque jour l'or potable des alchimistes, pour ne jamais vieillir.
Il paraît que c'est ce qui la tua.
Il paraît aussi que plus tard, à la Révolution, son cadavre embaumé et intact fut jeté dans la boue, que ses longs cheveux d'or pur qui ne blanchirent jamais firent des perruques aux rois du carnaval, et que son splendide sarcophage de marbre noir fut transformé en auge à cochons.
Sic transit, etc.
Même les fous n'oseraient pas en rire.
Pourtant, je suis sûre que notre Dali à la moustache embaumée, qu'on déterrera peut-être prochainement lui aussi pour lui sonder la moelle, aurait trouvé très drôle l'histoire de cette Diane en cheveux, follement surréelle, et paranoïaque-critique en diable.
Car il l'a toujours su, lui, au moins, que ceux qui veulent écrire leur vie en forme de légende, pour en faire leur chef-d'oeuvre,
la mort se venge d'eux,
et, qu'avec ses gros doigts tachés de sang, de boue et de fumier, elle s'amuse à leur rédiger une suite de sa façon, en manière d'hologramme dadaïste ou de tragédie baroque.