Juste un faux pas
Tout s'était enchaîné de manière si bizarre... La veille au soir, il avait terminé ce roman du Japonais Haruki Murakami, l'un des derniers parus, celui qui a pour héros un personnage dont le nom n'a pas de couleur mais signifie "fabriquer" - l'incolore Tsukuru, qui fabrique des gares mais peine à trouver la couleur de sa vie. Et, juste avant de s'endormir, au tout dernier chapitre de ce qui jusque là lui avait semblé n'être qu'un roman d'amour, d'amitié et de vagues fantômes, il avait lu soudain ces remarques étonnantes et sans le moindre rapport apparent avec tout ce qui avait précédé : "Prendre garde à ne pas tomber dans l'escalier, à ne pas perdre une chaussure, ce sont là des questions vitales dans une gare gigantesque, à une heure de forte affluence... ". Ne pas tomber dans un escalier, soit, mais ne pas perdre une chaussure... comment pouvait-on dire qu'il s'agissait d'une question vitale ? Ces Japonais étaient décidément des gens très étranges... Il avait jeté un coup d'oeil sur la descente de lit... Ses chaussures étaient toujours là. Une belle paire de chaussures, solides et assurées, qui l'attendaient bien rangées. Des chaussures élégantes, bien sûr, et qu'en effet il n'aimerait pas perdre, mais des chaussures banales assurément, qui rempliraient banalement leur mission, et soutiendraient banalement ses pieds, le lendemain comme chaque jour, lorsqu'il se serait habillé et rasé. Des chaussures, en somme, que nul n'aurait l'idée de fixer du regard en marchant comme si elles ne rêvaient que de s'enfuir [...]
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