Dans le panneau
Un panneau en maillot, allongé sur le sable au soleil des vacances, dans ce long juin d'inondations ? Absurde, n'est-ce pas, dérisoire, indécent. Ridicule. Inutile. Et tellement cigale, au pays des fourmis.
Pourtant. Je me souviens d'une comptine d'enfance :
On disait "Un, deux, trois, soleil", tout en fermant les yeux. C'était déjà l'été. Puis lorsqu'on les rouvrait, c'était toujours l'hiver, on courait comme un loup. Mais on avait encore un peu de chaud au coeur et de tendresse aux yeux.
Non, ça ne sert à rien de dérouler sur les pavés la plage détrempée comme un tapis volant.
Non, ça ne se peut pas d'interdire au soleil d'interdire le printemps.
Et ça n'a pas de sens d'habiller les désastres d'un bikini d'été.
On ne se bronze pas de mots, et nul dessin jamais n'empêchera les crues de passer par chez nous dans leurs barques qui tanguent.
D'accord.
Mais à ceux qui essaient chaque nuit de repeindre en beaux jours nos vies qui coulent à pic,
aux humbles pariétaux, aux Cidrolin d'ici qui ne renoncent pas à orner comme grottes nos villes au ras du ciel,
je tire tout de même ici mon chapeau
sous mon grand parapluie.
Car ces doux inutiles ces tombés du panneau cigales insubmersibles viennent battre pour nous de leurs ailes légères le briquet de l'enfance ravivant d'un sourire la petite lueur qui pourrait bien s'éteindre au fond des coeurs noyés.
Car ces doux inutiles ces tombés du panneau cigales insubmersibles viennent battre pour nous de leurs ailes légères le briquet de l'enfance ravivant d'un sourire la petite lueur qui pourrait bien s'éteindre au fond des coeurs noyés.