Vous qui peinez et travaillez
J'ai pu voir enfin, hier, à l'occasion des journées du Patrimoine, les belles fresques de l'ancienne église ouvrière des Batignolles.
"Venez à moi, vous qui peinez et travaillez", disait le grand Christ de l'autel à tous ceux que la vieille malédiction a condamnés à travailler à la sueur de leur front et qui s'affairent autour de lui.
J'ai pensé à Diego Rivera. Une référence tellement inattendue, dans cette petite église nantaise.
On représente souvent, dans les églises, ici ou là, de chapiteau naïf en statue émoussée, l'humble travail des Humbles. Mais il n'est pas fréquent de le célébrer ainsi, somptueusement, et de lui consacrer - littéralement - l'essentiel du décor.
Si peu fréquent même, si surprenant et si dérangeant - par ce mot j'entends qu'un certain ordre est mis à mal, bouleversant rangs et places -, que je me suis demandé si ce n'était pas pour cela, au fond, et non pour on ne sait quel risque d'écroulement, que cette église des pauvres, échappant à grand peine à la démolition, avait été, après un demi-siècle seulement d'existence, définitivement fermée, remplacée par un nouveau et terne bâtiment de béton.
Quoi qu'il en soit, j'ai admiré cette célébration naïve de la peine des hommes.
Des hommes... Et des femmes aussi.
Car, et c'est sans doute le plus admirable et le plus dérangeant, dans cette église où Marie elle-même dresse la table en compagnie du petit Jésus, avant de retourner ravauder son linge, elles n'ont pas été oubliées, ces millions de femmes laborieuses qui cousent, nourrissent et soignent, et, de tous leurs efforts méprisés, toujours recommencés, soutiennent le monde et le font tourner, le créant et le recréant sans cesse - divinement.