Reculez...

Publié le par Carole

Reculez...
L'étrange inscription me barrait le chemin.
"Reculer pour mieux sauter" : voilà une triste banalité. Un proverbe, un cliché. Une formule à dire comme on dit tant de choses dont on ne sait que dire.
Mais tout à coup ce "Reculez ! allez-y, n'hésitez pas, reculez ! vous n'en sauterez que mieux ", c'était bien autre chose : un soupçon de leçon, le bois de fantaisie dont on fait les pensées.
On pourrait reculer tout à fait et ne jamais sauter... Ou sauter tout d'un coup, oublier dans la chute la pesante prudence des fausses évidences... Mais non, il nous faut reculer, reculer, loin de tous les bavards. Reculez, reculez ! Prenez de la distance, quittez vos lieux communs, reculez et fuyez, pour pouvoir regarder, et pour pouvoir penser - et pour enfin sauter où vous devez aller !
Tant de clichés sans saveur ont posé leurs cerises fanées sur nos cerveaux éteints. Et tant de mots sans vie coulent de sotte source, au robinet terni des mornes certitudes et des idées reçues.
 
Je l'ai aimée, cette inscription. Car elle nous rappelait, à sa façon de malice, que nos chemins sont barrés par les mots bien plus que par les planches, et que la liberté commence quand la langue nous démange. En terre de poésie.
Qu'en bousculant les mots, on abat les cloisons. Pour mieux sauter. 
 

Publié dans Fables

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H
Trop de phrases toutes faites. Comme si on n'osait plus avoir ses pensées à soi. J'aime ce texte.<br /> Amitiés
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R
Personnellement, j'aime cette inscription parce qu'elle détourne, - non pas pour l'oreille, car tout le monde l'entend de la même manière, mais pour l'oeil, car tout le monde ne la "voit" pas, et donc ne la lit pas, et donc ne la comprend pas de la même manière -, le banal aphorisme à l'infinitif pour en faire un important impératif ... catégorique.<br /> <br /> Ceci posé, je ne suis pas vraiment certain que là, dans ce parc, celui qui l'a fait graver s'est rendu compte de cette capitale mutation sémantique.<br /> <br /> Elle eût eu encore bien plus d'importance, plus de poids philosophique à mes yeux, si elle avait figuré dans un de ces graffiti dont Nantes, à vous lire, semble posséder le secret et l'artiste poète dont vous nous révélez parfois les traces murales ...
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C
Je pense que celui qui a posé la planche savait ce qu'il faisait : il s'agissait d'un parcours "métaphysique" (un trop grand mot peut-être, d'accord, mais c'était celui qui était employé)
L
Pris dans l'engrenage mondial des idées reçues, machinalement on répète,on suit, on oublie le recul indispensable pour se retrouver en tête-à-tête avec soi-même. Car il nous faut élaguer le fardeau des habitudes, des on-dit, des idées reçues. reculer, encore et encore, jusqu'à notre vraie source intérieure. Et alors, nous pouvons "sauter". Vers une autre vérité, la nôtre.
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J
Manière de prendre du recul pour mieux analyser la situation avant de franchir l'obstacle. Je trouve cela plus intéressant que la signification qu'on lui donne habituellement. Bonne journée Carole; Amitiés; Joëlle
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N
Reculer, non, allons-y sautons...et avançons.<br /> Bon mardi.
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G
Reculez pour mieux sauter...consiste simplement à prendre son élan
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Q
Eh oui... et j'aime la façon dont tu mets en mots nos peurs, nos hésitations, notre envie de... jamais réalisée.<br /> Pourquoi pas ?
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F
et des cloisons c'est qu'il y en a à abattre
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N
Reculez pour mieux sauter. Je ne sais si vraiment le saut sera meilleur. Il faudra prendre garde à qui vient derrière... ** )
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Z
joli!
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F
"Reculez pour mieux sauter"!! EH oui, il faut reculer pour prendre son "élan" et sauter!! aussi, c'est drôle mais cette inscription à le mérite d'être claire et drôle à la fois!! hihi BISOUS FAN
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M
Une plaisanterie dans un bois ou dans un parc, c'est aussi merveilleux qu'inattendu. Un étape d'un parcours peut être?<br /> Surprendre est une belle action. Symbolique ou amusante, cela dépend du regard.
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E
Ton texte est un condensé de poésie philosophique ! <br /> "Tant de clichés sans saveur ont posé leurs cerises fanées sur nos cerveaux éteints. Et tant de mots sans vie coulent de sotte source, au robinet terni des mornes certitudes et des idées reçues." <br /> Un constat pessimiste, mais tellement vrai... <br /> A part ça, je serais curieuse de savoir où tu as pris cette photo : c'est tout de même dangereux pour les personnes qui marchent le nez en l'air !...
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C
C'était dans un parc public, et, même moi qui marche toujours le nez en l'air, j'ai réussi à ne pas tomber. A vrai dire j'ai même sauté sur l'occasion.
A
Eh oui, les planches les barrières, on les abat, mais les mots font qu'une fois l'obstacle franchi, nous nous empressons d'en construire d'autres, parfois plus hautes et plus robustes...
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A
Bonjour Carole ! Bien que pas du tout d'accord avec l'idée qu'il s'agisse d'un cliché - et persuadée que tu aurais pu écrire un billet tout aussi réussi sur l'approbation totale et entière de cette formule - je reconnais que tu nous offres une perle à méditer en affirmant que "nos chemins sont barrés par des mots bien plus que par des planches". Là encore tu as fait fort !
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C
Le cliché, c'est lorsque le verbe est à l'infinitif. Ce que j'ai bien aimé, c'est le détournement grammatical de l'expression "toute faite". Défaire les lieux communs pour exister, c'est une lourde tâche, en réalité.
C
Ne pas toujours tourner sept fois sa langue dans sa bouche.
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M
Bonjour Carole,<br /> <br /> J'aime bien ton analyse et sa conclusion.<br /> "que nos chemins sont barrés par les mots bien plus que par les planches, et que la liberté commence quand la langue nous démange. En terre de poésie.<br /> Qu'en bousculant les mots, on abat les cloisons. Pour mieux sauter. "<br /> <br /> Sauter dans l'inconnu<br /> Oser<br /> Parfois, ça paye<br /> <br /> ;)
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J
Bonsoir Carole... analyser une situation pour prendre la meilleure décision... ici ce n'est guère trop haut et par derrière à moi le chemin du bois... mais pensons au loup ! ;-)
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